L'Observatoire sur la chiropratique
Découvrir. Comprendre.
  Niveau supérieur

La dégénérescence discale et la lombalgie chronique

Uneven intervertebral motion sharing is related to disc degeneration and is greater in patients with chronic, non-specific low back pain: an in vivo, cross-sectional cohort comparison of intervertebral dynamics using quantitative fluoroscopy
Alan Breen and Alexander Breen
Eur Spine J (2018) 27:145–153

La lombalgie chronique non spécifique est d’origine multifactorielle et associée à des causes mécaniques, biochimiques et neuroplastiques. Parmi les causes mécaniques, des déficiences dans les mouvements intervertébraux et la dégénérescence discale sont des facteurs importants. Il n’existe par contre aucun outil diagnostique en mesure de déterminer si un disque intervertébral est la source de la douleur. Il n’existe pas non plus de marqueurs fiables pouvant mettre en évidence des déficiences dans les mouvements intervertébraux.

La colonne lombaire est une chaîne cinétique dont le mouvement global se distribue parmi ses différents segments. Les études en continu des variations des mouvements intervertébraux sont d’intérêt, car elles procurent plus d’information que les études statiques.

La fluoroscopie quantitative permet de mesurer les mouvements intervertébraux et de calculer des variables pouvant décrire différentes formes d’instabilité vertébrale. Certaines études ont déjà montré des différences significatives à cet égard entre des patients souffrant de lombalgie chronique et des sujets contrôles.

L’objectif principal de la présente étude est de vérifier s’il existe des relations entre la façon dont le mouvement est réparti entre les segments vertébraux lombaires, la dégénérescence discale et l’âge.

Quarante participants ont été recrutés (âge moyen d’environ 50 ans). Vingt d’entre eux souffraient de lombalgie chronique non spécifique et vingt étaient des sujets contrôles sans lombalgie.

Les mouvements lombaires de ces sujets ont été évalués sous fluoroscopie selon deux conditions expérimentales :

1) De manière passive (position couchée sur une table motorisée articulée) avec mesure des déplacements intervertébraux en flexion, extension rotation droite et rotation gauche.;
2) De manière active (position debout) avec mesure d’un mouvement de 60 degrés de flexion.

À l’aide des données obtenues à partir des images de fluoroscopie, les auteurs ont calculé trois variables:

1) Un indice de dégénérescence discale;
2) Un indice de répartition des mouvements intervertébraux (intervertebral angular motion sharing inequality);
3) Un Indice de variabilité de la répartition des mouvements intervertébraux (intervertebral angular motion sharing variability).

Dans l’ensemble, les patients lombalgiques montrent des mouvements moins réguliers que les patients sans lombalgie.

Les résultats de l’étude montrent aussi qu’il existe une corrélation significative entre la dégénérescence discale et l’irrégularité des mouvements lombaires actifs et passifs. Ceci suggère que la lombalgie chronique est associée à la dégénérescence discale autant dans la dynamique passive des mouvements que dans leur contrôle actif.

Les auteurs offrent deux explications possibles :

1) Cette irrégularité augmenterait les demandes métaboliques musculaires pendant les activités de la vie quotidienne causant des douleurs musculaires récurrentes;
2) Cette irrégularité serait la cause d’accélérations rapides des mouvements des vertèbres ce qui pourrait être générateur de douleur.

Les fortes associations trouvées entre la dégénérescence discale et les mouvements irréguliers chez les lombalgiques sont cohérentes avec les études discographiques qui montrent que des disques douloureux sont habituellement endommagés (voir exemple ici) et les études qui montrent que la dégénérescence discale est associée avec la lombalgie plus particulièrement quand il y a des modifications des plateaux vertébraux (voir exemple ici).

Cette étude cadre également bien avec le modèle conceptuel de la lombalgie chronique non spécifique publié par Barz et al. qui associe la dégénérescence structurelle aux phénomènes de compensation mécanique et de stabilité. Par exemple, dans un mouvement passif une meilleure répartition des mouvements, malgré la présence de changements dégénératifs pourrait être interprétée comme le résultat de compensations structurelles qui permettent le soulagement des symptômes.

Les résultats de cette étude pavent la voie vers des études additionnelles sur la répartition des mouvements parmi les segments vertébraux lombaires et leur utilité en termes de diagnostic et de pronostic chez les lombalgiques.

Note du rédacteur : des questions peuvent être soulevées à l’égard du taux de radiation associé à la fluoroscopie. Des informations additionnelles sont disponibles ICI.

Photo de la page d’accueil : Swing table and fluoroscope configuration (Atlas Clinical Ltd)