Par Christophe Langevin, étudiant au doctorat aux laboratoires de de Jérôme Comte et d'Isabelle Laurion à l’Institut national de la recherche scientifique au Centre Eau - Terre -Environnement de Québec, et aussi cosupervisé par Vani Mohit, biologiste au Centre d’expertise en analyse environnementale du Québec du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (le MELCCFP)
Les écosystèmes aquatiques d’eau douce, incluant les lacs, sont des réservoirs dissimulant une diversité microbienne précieuse1. Cette diversité nécessite d’être explorée et étudiée pour pouvoir mieux comprendre les principaux problèmes environnementaux comme le vieillissement prématuré (eutrophisation) de nos lacs.
Les outils d'analyse du génome comme la métagénomique permettent d'explorer la dynamique des microbes et leurs réponses à diverses perturbations.
Par exemple : Quel est l’impact de l’activité humaine et des changements climatiques sur la biodiversité des microbes ? Si certaines espèces microbiennes diminuent et que certains groupes venaient à disparaître, ou encore que d’autres groupes venaient à prendre plus de place, les fonctions qu'ils assurent dans l'environnement comme la dégradation de la matière organique ou la production d'oxygène sont-elles maintenues ?
Démystifions ensemble les termes reliés à l'étude de ce « petit » monde!
Les micro-organismes, aussi appelés microbes, sont la forme de vie la plus dominante sur terre ! Ils prospèrent dans tous les écosystèmes et tous les environnements connus. On les retrouve dans les profondeurs des océans, les sols, les lacs, dans l’obscurité, le grand froid, dans l’intestin humain et même à bord de la station spatiale internationale. Bien que les microbes soient invisibles à l’œil nu, ils fournissent d’innombrables services indispensables aux milieux dans lesquels ils vivent (p. ex. le recyclage et la biodégradation)2. Par exemple, ils jouent un rôle clef dans les différents cycles et processus biogéochimiques essentiels comme la fixation de l’azote, le cycle du carbone et du soufre3. Les microbes qui habitent les lacs participent à la santé de l’écosystème et aux cycles biogéochimiques qui permettent aux lacs de fournir leurs services écologiques comme la régulation du climat, une source d’eau potable de qualité ainsi qu’une réserve de nourriture.
Les microbes sont omniprésents et constituent un maillon crucial de tout écosystème. Les microbes sont des micro-organismes incluant les procaryotes (bactéries, archées), mais aussi les eucaryotes (microalgues, champignons) et même les virus.
Le microbiote ou la communauté microbienne réfère à l’ensemble des microbes (bactéries, eucaryotes, virus, champignons, archées) présents dans un environnement défini comme un intestin, une bouche, un lac ou un sol4.
Le microbiome constitue l’habitat, aussi appelé biome, incluant les microbes donc le microbiote, leurs génomes, leurs activités métaboliques, leurs interactions, leurs fonctions écologiques et les conditions physico-chimiques environnantes (température, humidité, pH, matières organiques, taux d'oxygène)5,6.
De façon traditionnelle, l’étude des microbes s’effectue par microscopie et notamment à l’aide de la culture microbienne, comme la croissance dans une boîte de pétri. Cependant, en laboratoire, la plupart des microbes ne sont pas cultivables de cette façon. Pourquoi ? Parce que, pour certains micro-organismes, il y a des conditions de croissance qui sont parfois difficiles à reproduire en laboratoire; des conditions plus complexes impliquant différents éléments nutritifs ou encore l’interaction avec d’autres microbes.
En science moderne, l’étude des microbes s’effectue à l’aide de la métagénomique. La métagénomique étudie l’ensemble des génomes d’un microbiote qu'on appelle métagénome. Cette approche implique des techniques de séquençage à haut débit, aussi appelé séquençage nouvelle génération (NGS), et des outils de bio-informatique. Le Séquençage nouvelle génération permet d’identifier, une à une, à l'aide de signaux lumineux distincts ou de signaux électriques uniques, les unités de construction qui constituent l’ADN ou l’ARN d’un organisme; l’ADN et l’ARN sont deux macromolécules présentent chez tous les êtres vivants et supportant une quantité phénoménale d’information génétique. On dit nouvelle génération puisque les coûts, le temps et l’effort requis pour « lire » ces unités de construction sont réduits comparativement aux méthodes conventionnelles. La métagénomique offre un pouvoir analytique accru et permet une meilleure description de la diversité microbienne et des fonctions biologiques du microbiote7. Toutefois, cette méthode demeure semi-quantitative comparativement à la microscopie traditionnelle. La microscopie n’est donc pas remplacée par cette technologie, mais plutôt complémentée.
*ADN : Acide désoxyribonucléique, molécule double-brin située dans les cellules vivantes et portant le matériel génétique.
Références :
1. Mareckova, M., et al., Expanding ecological assessment by integrating microorganismsinto routine freshwater biomonitoring. Water Research, 2021. 191: p. 116767.
2. Fuhrman, J.A., Microbial community structure and its functional implications. Nature, 2009. 459(7244): p. 193-199.
3. Rousk, J. and P. Bengtson, Microbial regulation of global biogeochemical cycles. FrontMicrobiol, 2014. 5: p. 103.
4. Marchesi, J.R. and J. Ravel, The vocabulary of microbiome research: a proposal.Microbiome, 2015. 3: p. 31.
5. Prescott, S.L., History of medicine: Origin of the term microbiome and why it matters. Human Microbiome Journal, 2017. 4: p. 24-25.
6. Berg, G., et al., Microbiome definition re-visited: old concepts and new challenges. Microbiome, 2020. 8(1): p. 103.
7. Tas, N., et al., Metagenomic tools in microbial ecology research. Curr Opin Biotechnol,2021. 67: p. 184-191.
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Mis en ligne en juillet 2024
Menaces sur les lacs était un projet du GRIL financé par le Programme DIALOGUE des Fonds de recherche du Québec