La nature du cube
Mon intention de création pour ce premier projet était de traiter du thème, l’autonomie, par son contraire en restreignant un élément naturel à l’intérieur d’une fabrication humaine. Je m’intéressais à notre impact envers la nature, donc j’ai voulu pousser ma réflexion sur le sujet en utilisant une matière vivante et une matière industrialisée. Je voulais depuis un certain moment inclure des végétaux dans mes réalisations, mais je ne savais pas trop comment le faire avant aujourd’hui.
Actuellement, nous vivons dans l’ère anthropocène qui est une nouvelle époque géologique se caractérisant par l’impact de l’être humain sur son environnement. L’être humain est devenu l’acteur central de plusieurs changements, car il exerce une influence sur son habitat et le module pour combler ses désirs et ses besoins. Pour ce faire, j’ai décidé d’exercer cette influence que nous avons sur notre milieu en contraignant un élément naturel à l’intérieur d’un cube qui démontre notre fonctionnement de vie industrialisé.
Étant prisonniers dans une cage métallique, les végétaux sont contraints de s’y moduler en risquant leurs pertes. L’enfermement réduit l’espace que peut avoir cette matière, mais la laisse vivre à l’intérieur. Une structure humaine vient organiser l’espace lui imposant son influence. En revanche, il y a toujours une fuite possible, car la matière organique peut en sortir et reprendre ces droits.
200 clous plus tard…
Pour cette deuxième conception, je voulais réaliser mon projet de squattage en continuant dans la même lignée que le premier projet en reprenant une forme géométrique et des matériaux bruts. Le carré est une forme couramment exploitée dans ma démarche d’artiste, donc j’ai repris cette forme qui fait partie de ma création.
Dans cette nouvelle situation, je voulais traiter le cube différemment en incorporant un matériau créé par l’être humain. Pour ce faire, j’ai réalisé un cube noir possédant des clous installés aléatoirement sur deux surfaces pour donner l’impression qu’une ville immergeait de cette forme géométrique. Avec les clous posés sur deux côtés, j’ai mis de l’avant la modulation et les variations non perceptibles que les grandes villes apportent à notre monde et qu’elles pourraient s’étendre dans un nouveau lieu.
Passant de la nature à un habitat rural aménagé, ce cube représentant un milieu moderne et industrialisé semble aspirer à prendre sa place. Au premier coup d’œil, il n’a pas l’air au bon endroit par son apparence, mais risque de transformer son nouveau foyer en changeant notre perception sur notre monde. Modulant son site, il nous donne une vague impression qu’il pourrait se répandre par ces clous qui le définissent. Comme le monolithe dans 2001, l’Odyssée de l’espace cette forme géométrique impacte les sites par sa présence. Squattant deux lieux différents, il nous oblige à prendre conscience du pouvoir de l’être humain à changer son espace de vie.
L’industrialisé
Pour ce projet de sculpture ayant comme thème « art et nature », je voulais continuer mon exploration sur les matériaux bruts/naturels et les matériaux transformés/industrialisés. En revanche, je n’étais pas certaine de vouloir continuer dans la lignée du cube. J’avais l’impression d’avoir fait le tour et que je devais sortir de cette forme géométrique pour essayer autre chose. Après mûre réflexion, je suis arrivé à la conclusion qu’il me restait encore plein d’expérimentation et de matériaux à essayer.
Pour la création de ce nouveau cube, j’ai décidé d’utiliser un matériau qui est qui à la base naturel, mais que l’industrie a transformé pour l’exploiter autrement. Pour ce faire, j’ai décidé de mettre de l’avant des brochettes faites en bois dû à la transformation qu’on leur apporte et à la dénaturation qu’on leur fait. Ce produit commercialisé est passé par une tonne de traitement, de transformation et n’est plus aussi naturel qu’il le laisse transparaitre. Avec ce point de vue en tête, j’ai construit ce cube pour traiter encore une fois de notre impact sur notre environnement et comment nous transformons et réexploitons de manière dévastatrice.
Ayant recourt à une quantité extraordinaire de brochettes en bois manufacturé, j’ai aussi choisi de minimiser l’impact que je pouvais avoir pour traiter du thème « art et nature ». Allant dans une lignée plus naturelle, les brochettes sont maintenues en place seulement par leurs positionnements et composent un cube fragile comme notre environnement actuel, un seul faux mouvement et tout s’écroule…
Pour ce dernier projet de sculpture, je désirais continuer dans la même direction que mes projets précédant en exploitant le cube, mais cette fois-ci, en y incorporant un autre aspect de ma démarche artistique. Dernièrement, les lieux abandonnés me captivent par leurs esthétiques et par leurs histoires, donc j’ai voulu mixer mes deux approches. Cependant, je souhaitais aussi y inclure certaines de mes influences artistiques. Le travail d’Andrée-Anne Laberge m’a inspiré par sa fabrication de maison ayant passé par des catastrophes naturelles et des catastrophes psychologiques. À mon tour, j’ai construit ma propre demeure désertée pour la présenter dans un emplacement restreint, un cube.
Empilé les uns par-dessus les autres et dans certains cas les uns dans les autres, je joue avec les cubes comme un enfant pour créer une illusion d’édifice à multiples étages. Chaque cube nous laisse voir son intérieur et y renferme quelque chose. Parfois vide, parfois faiblement illuminer et parfois inhabité, nous sentons toujours l’influence du passage de l’être humain. Même à plus petite échelle, nous sommes interpelés par ses vestiges. Ses endroits délaissés qui forgent notre paysage sans que nous nous en rendions compte. Nous les abandonnons pour de multiples raisons, mais ils continuent d’exister par leur simple présence et leur histoire. Le temps semble arrêté pour ses endroits, mais ils ne s’arrêtent pas de vivre comme la faible lumière qui se dégage de l’infime maison sous nos yeux. Au final, ce n’est qu’un lieu rural inhabité qui est restreint pour ce qu’il est.