Entendre ancien français

 
PERCEVAL
(CONTE DU GRAAL)
 
Introduction
 
L'objectif du site est de ''donner à entendre '' les prononciations du Moyen Âge, domaine des études médiévales qui a souvent été négligé, et dont la problématique est connue (voir à ce propos l'article, lisible en ligne, de Dominique Lagorgette
Quel ancien français pour quels étudiants? présenté dans la bibliographie).
 
 
Nous avons choisi de présenter des extraits du site de May Plouzeau, PercevalApproches (appelé '' Perceval Approches '' exclusivement dans la page d'accueil), car celui-ci est l'un des rares dans le web, sinon le seul, où l'on peut entendre la version sonorisée d'un texte médiéval. Le site est publié à l'origine par le Laboratoire de Français Ancien (LFA) de l'Université d'Ottawa.  
 
Le texte des extraits, tiré de PercevalApproches, est le suivant : Lecoy (Félix), éd., Les romans de Chrétien de Troyes édités d'après la copie de Guiot (Bibl. nat. fr. 794), t. V et t. VI, Le Conte du Graal (Perceval) ; Paris (Champion) ; 2 vol. ; [189] et [171] p. (CFMA, 100, 103.)  
Ont été utilisés par May Plouzeau une impression de 1972 ou 1973 pour le premier volume (qui porte ces deux dates) et de 1975 pour le second.  
 
May Plouzeau expose de façon détaillée, dans l'enregistrement e1, section ◊Enregistrements des ◊Utilitaires de PercevalApproches, les problèmes posés par une prononciation restituée à partir de textes écrits. On ne doit pas oublier que toute prononciation restituée est le produit de choix qui peuvent être discutés. May Plouzeau précise que la prononciation adoptée prétend se rapprocher de celle d'une '' personne vivant à l'Est de Paris vers 1230-1240 et qui serait assez conservatrice. '' 
 
Pour les traductions et les gloses que l'on trouve sous les mots cliquables, nous combinons les gloses de May Plouzeau dans PercevalApproches, la traduction de Simone Hannedouche, Le Roman de Perceval, Triades, 1969, établie à partir du manuscrit français No 12576 de la Bibliothèque Nationale, l'édition Perceval traduite par Daniel Poirion, Hatier, 2007 et nos propres interprétations.  
 
Les traductions et commentaires ne sont pas l'objectif principal de notre travail. Ils ne sont fournis ou signalés que pour fixer les idées.  
 
La traduction complète de chaque extrait se trouve indiquée sous le dernier mot du premier vers.  
 
Les chapitres indiqués sont ceux du texte de May Plouzeau. Nous avons numéroté les paragraphes que nous avons choisi de présenter. Sous le premier mot de chaque vers, nous avons mis un renvoi au paragraphe précis de PercevalApproches.  
 
Les extraits de texte ne sont pas automatiquement présentés selon le fil de la narration, mais selon un ordre choisi par May Plouzeau, pour suivre certaines explications philologiques.  
 
Nous nous sommes permis parfois de simplifier les gloses pour faciliter la lisibilité à l'écran. On trouvera dans le site PercevalApproches l'ensemble des explications philologiques détaillées du texte de Perceval.  
 
Nous n'en conservons qu'une partie minime ici.  
 
L'ensemble des textes du site est imprimable par l'icône d'imprimante située dans la partie supérieure gauche de l'écran.  
 
.../2
Mot Annotation
PERCEVAL
(CONTE DU GRAAL)
Introduction
L'objectif du site
est de ''donner à entendre '' les prononciations du Moyen Âge, domaine des études médiévales qui a souvent été négligé, et dont la problématique est connue (voir à ce propos l'article, lisible en ligne, de Dominique Lagorgette
Quel ancien français pour quels étudiants? présenté dans la bibliographie).
Nous avons choisi de présenter des extraits du site de May Plouzeau,
PercevalApproches
(appelé '' Perceval Approches '' exclusivement dans la page d'accueil),
car celui-ci est l'un des rares dans le web, sinon le seul, où l'on peut entendre la version sonorisée d'un texte médiéval. Le site est publié à l'origine par le Laboratoire de Français Ancien (LFA) de l'Université d'Ottawa.
Le texte des extraits, tiré de
PercevalApproches,
est le suivant : Lecoy (Félix), éd.,
Les romans de Chrétien de Troyes édités d'après la copie de Guiot (Bibl. nat. fr. 794),
t. V et t. VI,
Le Conte du Graal (Perceval)
; Paris (Champion) ; 2 vol. ; [189] et [171] p. (CFMA, 100, 103.)
Ont été utilisés par May Plouzeau une impression de 1972 ou 1973 pour le premier volume (qui porte ces deux dates) et de 1975 pour le second.
May Plouzeau expose de façon détaillée, dans l'enregistrement
e1,
section ◊Enregistrements des ◊Utilitaires de
PercevalApproches,
les problèmes posés par une prononciation restituée à partir de textes écrits.
On ne doit pas oublier que toute prononciation restituée est le produit de choix qui peuvent être discutés.
May Plouzeau précise que la prononciation adoptée prétend se rapprocher de celle d'une '' personne vivant à l'Est de Paris vers 1230-1240 et qui serait assez conservatrice. ''
Pour les traductions et les gloses que l'on trouve sous les mots cliquables, nous combinons les gloses de May Plouzeau dans PercevalApproches, la traduction de Simone Hannedouche, Le Roman de Perceval, Triades, 1969, établie à partir du manuscrit français No 12576 de la Bibliothèque Nationale, l'édition Perceval traduite par Daniel Poirion, Hatier, 2007 et nos propres interprétations.
Les traductions et commentaires ne sont pas l'objectif principal de notre travail. Ils ne sont fournis ou signalés que pour fixer les idées.
La traduction complète de chaque extrait se trouve indiquée sous le dernier mot du premier vers.
Les chapitres indiqués sont ceux du texte de May Plouzeau. Nous avons numéroté les paragraphes que nous avons choisi de présenter. Sous le premier mot de chaque vers, nous avons mis un renvoi au paragraphe précis de
PercevalApproches.
Les extraits de texte ne sont pas automatiquement présentés selon le fil de la narration, mais selon un ordre choisi par May Plouzeau, pour suivre certaines explications philologiques.
Nous nous sommes permis parfois de simplifier les gloses pour faciliter la lisibilité à l'écran. On trouvera dans le site PercevalApproches l'ensemble des explications philologiques détaillées du texte de Perceval.
Nous n'en conservons qu'une partie minime ici.
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PERCEVAL
 
Veuillez consulter PercevalApproches pour des commentaires philologiques détaillés.  
 
Traduction de chaque extrait sous le dernier mot du premier vers.  
 
Renvoi au paragraphe de PercevalApproches sous le premier mot du premier vers.  
 
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Mot Annotation
PERCEVAL
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Traduction de chaque extrait sous le dernier mot du premier vers.
Renvoi au paragraphe de
PercevalApproches
sous le premier mot du premier vers.
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voix: May Plouzeau
 
CHAPITRE 1  
1-Si s'an va tot selonc la rive, -v1313  
lez une grant roiche naïve,  
et de l'autre part l'eve estoit  
si que l'eve au pié li batoit.  
Sor cele roche, an un pandant  
qui vers mer aloit descendant,  
ot un chastel mout riche et fort. -v1319
Mot Annotation
voix: May Plouzeau
CHAPITRE 1
1-Si PercevalApproches 1.1.2.2.

Abréviation pour ''May Plouzeau PercevalApproches chap. 1.1.2.2.''

s'an va tot selonc
la rive, Il suit donc la rive,

Il suit donc la rive
près d'une grande falaise de roche vive,
et de l'autre côté il y avait de l'eau
qui battait le pied de la falaise.
Sur le penchant de la falaise
qui descendait vers la mer,
se dressait un château riche et fort.

-v1313
lez une grant roiche
naïve, près d'une grande falaise de roche vive,
et de l'autre part l'eve
estoit et de l'autre côté il y avait de l'eau
si que l'eve au pié li
batoit. qui battait le pied de la falaise.
Sor cele roche, an un
pandant Sur le penchant de la falaise
qui vers mer aloit
descendant, qui descendait vers la mer
ot un chastel mout riche et
fort. se dressait un château riche et fort.
-v1319
2-Bien sachoiz que je vos ferroie, -v1098  
se plus parler m'an feisïez.  
Lors fu li chevaliers iriez, -v1100
Mot Annotation
2-Bien PercevalApproches 1.1.2.4
sachoiz que je vos
ferroie, Sachez bien que je vous frapperais,

sachez bien que je vous frapperais
si vous me faites parler davantage.
Alors le chevalier se fâcha.

-v1098
se plus parler m'an
feisïez. si vous m'en faisiez parler davantage
Lors fu li chevaliers
iriez, Alors le chevalier fut en colère.
-v1100
CHAPITRE 2 - Début  
3.A .IIII. parties del mur -v1331  
don li quarrel estoient dur  
avoit .IIII. basses torneles,  
qui mout estoient forz et beles.  
Li chastiax fu mout bien seanz  
et bien aeisiez par dedanz.  
Devant le chastelet reont  
ot sor l'eve drecié un pont  
de pierre et d'areinne et de chauz -v1339
Mot Annotation
CHAPITRE 2 - Début
3.A .IIII. PercevalApproches 2.3.1.
parties del À quatre endroits du mur,

À quatre endroits du mur,
dont les pierres étaient dures,
il y avait quatre tourelles basses,
qui étaient très solides et très belles.
Le château avait très bon aspect et était très confortable à l'intérieur.
Devant la petite fortification ronde
il y avait sur l'eau un pont dressé
fait de pierre, de sable et de chaux.

mur À quatre endroits du mur,

À quatre endroits du mur,
dont les pierres étaient dures,
il y avait quatre tourelles basses,
qui étaient très solides et très belles.
Le château avait très bon aspect et était très confortable à l'intérieur.
Devant la petite fortification ronde
il y avait sur l'eau un pont dressé
fait de pierre, de sable et de chaux.

-v1331
don li quarrel estoient
dur dont les pierres étaient dures,
avoit .IIII. basses
torneles, il y avait quatre tourelles basses,
qui
mout L'adverbe mout peut se placer directement devant l'adjectif (cf. mout parfondev1311 “très profonde”) ou bien vers le début de la phrase, où il constitue à lui seul le corps tonique qui précède le corps verbal ou est un constituant de ce corps tonique ;

c'est ce qui se produit ici, mais sémantiquement, mout porte ici sur les adjectifs (plutôt que sur le premier adjectif seulement) qui viennent plus loin.

Le fait que mout fût souvent placé en début de phrase alors qu'il portait sémantiquement sur des mots plus éloignés lui aurait été fatal au cours du temps.

(Cet adverbe, aujourd'hui écrit moult, ne s'emploie plus guère que dans un contexte badin ; la prose journalistique en fait une grande consommation.)

estoient forz et
beles. qui étaient très solides et très belles.
Li
chastiax “Le chastel avait très bon aspect et était très confortable à l'intérieur”,

mais qu'est-ce qu'un chastel ?

Dans le corpus de FouletPerceval (qui n'est pas notre roman de Perceval : voir ◊Bibliographie), le nom chastel désigne la plupart du temps non exactement ce que nous traduisons par “château-fort”, mais “une agglomération où, autour de la demeure d'un seigneur, sont groupées des maisons, des rues, des places” (FouletPerceval p40).

En ce qui concerne le chastel de cet épisode-ci, Chrétien n'insiste pas sur l'aspect agglomération (même si l'on apprend que le seigneur du lieu y avait Riches meisons beles et granz v1553) ; mais le chastel v1705 de Beaurepaire est nettement une ville fortifiée (cf. v1750 et suivants).

L'embarras du traducteur est grand.

fu mout bien
seanz le chastel avait très bon aspect
et bien aeisiez par
dedanz. et était très confortable à l'intérieur.
Devant le chastelet
reont Devant la petite fortification ronde
ot sor l'eve drecié
un pont il y avait sur l'eau un pont dressé
de pierre et
d'areinne areinne = arène (français moderne) = sable.

Au Canada, un aréna est un centre sportif couvert comportant une patinoire.

et de
chauz fait de pierre , de sable et de chaux.

j'ajoute “fait” parce que “dressé de pierre” serait ambigu, et je veux garder dans la mesure du possible l'ordre des syntagmes adopté par Chrétien ;

en effet, le romancier choisit soigneusement l'ordre de présentation du paysage : que le pont soit sor l'eve c'est normal, et c'est une mention qui n'a pas à se faire désirer pour mieux se faire remarquer : mais les matières dans lesquelles il est construit (il pourrait être en bois) témoignent de la richesse du propriétaire.

-v1339
4-Et li vaslez sanz nul arest -v1301  
s'an va poignant par la forest  
tant que es terres plainnes vint  
sor une riviere qui tint  
de lé plus d'une arbalestee,  
si s'estoit tote l'eve antree  
et retrete an son grant conduit. -v1307
Mot Annotation
4-Et li vaslez PercevalApproches 2.3.2.
sanz nul
arest et le jeune homme sans s'arrêter du tout
s'en va à vive allure à travers la forêt
si bien qu'il arriva au terrain découvert
sur une rivière qui avait en largeur plus d'une portée d'arbalète,
et toute l'eau était entrée
et s'était retirée dans son grand lit.
-v1301
s'an va poignant par la
forest Littéralement “s'en va éperonnant à travers la forêt”, ce qui passe mal ;

on peut essayer “s'en va à vive allure à travers la forêt”.

tant que
es bien noter es terres plainnes : es, contraction de en + les(lemmes du TL : +en, +le la les), contient un article défini ; cet article est un article de notoriété : à toute forest s'attache un terrain découvert, sur son pourtour ; d'où ma traduction “au terrain découvert”.
terres plainnes
vint Si bien qu'il arriva au terrain découvert
sor une riviere qui tint
de lé plus d'une
arbalestee, Sur une rivière qui avait en largeur plus d'une portée d'arbalète,

je m'efforce de conserver l'ordre des mots ; Chrétien veut nous impressionner !

L'arbalète, contrairement à l'arc, s'arme au moyen d'un mécanisme, et est plus puissante.

si s'estoit tote l'eve antree et toute l'eau était entrée
et retrete an son grant
conduit. et s'était retirée dans son grand lit.
-v1307
5-Vers la grant riviere qui bruit -v1308  
s'an va tote une praerie,  
mes an l'eve n'antra il mie  
qu'il la vit mout parfonde et noire  
et asez plus corrant que Loire.  
Si s'an va tot selonc la rive,  
lez une grant roiche naïve,  
et de l'autre part l'eve estoit  
si que l'eve au pié li batoit -v1316  
 
.../3
Mot Annotation
5-Vers PercevalApproches 2.3.3.
la grant riviere qui
bruit Vers la grande rivière qui bruit

Vers la grande rivière qui bruit
il traverse une prairie
mais il n'entra pas dans l'eau,
car il la vit profonde et noire
et au courant plus rapide que la Loire.
Il suit donc la rive
près d'une grande falaise de roche vive,
et de l'autre côté il y avait de l'eau
qui battait le pied de la falaise.

-v1308
s'an va tote
une praerie, il traverse une prairie,
mes an l'eve n'antra il
mie mais il n'entra pas dans l'eau,
qu'il la vit mout parfonde et
noire car il la vit très profonde et noire
et asez plus corrant que
Loire. et au courant plus rapide que la Loire.
Si s'an va tot selonc
la rive, Il suit donc la rive,
lez une grant roiche
naïve, près d'une grande falaise de roche vive,
et de l'autre part l'eve
estoit et de l'autre côté il y avait de l'eau
si que l'eve au pié li
batoit
-v1316
.../3
PERCEVAL
 
Veuillez consulter PercevalApproches pour des commentaires philologiques détaillés.
Mot Annotation
PERCEVAL
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voix: May Plouzeau
 
CHAPITRE 2 (suite)  
6-Sor cele roche, an un pendant -v1317  
qui vers mer aloit descendant  
ot un chastel mout riche et fort  
Si com l'eve aloit au regort,  
torna li vaslez a senestre  
et vit les torz del chastel nestre,  
qu'avis li fu qu'eles nessoient  
et que fors del chastel issoient. -v1324
Mot Annotation
voix: May Plouzeau
CHAPITRE 2 (suite)
6-Sor PercevalApproches 2.3.4.
cele roche, an un
pendant Sur le penchant de la falaise

Sur le penchant de la falaise
qui descendait vers la mer,
se dressait un château riche et fort.
Comme l'eau formait là une baie,
le jeune homme tourna à gauche
et vit naître les tours du château,
car il lui parut qu'elles naissaient
et qu'elles sortaient du château.

-v1317
qui vers mer aloit
descendant qui descendait vers la mer,
ot un chastel mout riche et
fort se dressait un château riche et fort.
Si com l'eve aloit au
regort, Comme l'eau formait là une baie,
torna li vaslez a
senestre le jeune homme tourna à gauche
et vit les torz del chastel
nestre, et vit naître les tours du château,
qu'avis li fu qu'eles
nessoient car il lui parut qu'elles naissaient
et que fors del chastel
issoient. et qu'elles sortaient du château.
-v1324
7-En mi le chastel, an estant -v1325  
ot une tor et fort et grant;  
une barbacane mout fort  
avoit tornée vers le gort  
qui à la mer se combatoit,  
et la mers au pié li batoit, -v1330
Mot Annotation
7-En mi PercevalApproches 2.3.5.
le chastel, an
estant Au milieu du château,

Au milieu du château,
s'élevait une tour forte et grande;
il y avait une très solide barbacane
tournée vers le courant d'eau
qui livrait bataille à la mer
et la mer lui battait le pied.

-v1325
ot une tor et fort et
grant; s'élevait une tour forte et grande;
une
barbacane Voyez ce qu'est une barbacane
à cette adresse.
mout
fort il y avait une très solide barbacane
avoit il y avait une très solide barbacane

Il faudrait vérifier si dans le reste de PercL un inanimé est dit +avoir “posséder”. Je n'ai pas fait cette vérification.

Reste que avoit peut fort bien être impersonnel et signifier “il y avait”.

La traduction dans ce cas est “il y avait une barbacane très solide”, mais on ne sait pas où est située la barbacane.

Notez que selon l'interprétation choisie, le référent de li v1330 changera :

si la barbacane est dans la tor v1326 qui elle-même est au milieu (En mi v1325) du chastel, li v1330 réfère au chastel ;

si l'on comprend que le sujet de Avoit est le chastel, li v1330 peut référer au chastel ou à la barbacane ; si l'on comprend Avoit impersonnel, il est naturel de croire que li v1330 réfère à la barbacane.

Encore une fois, la représentation visuelle que l'on se fait dépend de l'analyse grammaticale que l'on pratique.

Moralité : l'ancien français n'est pas fait pour être traduit, il est fait pour être compris (mais n'oubliez pas la deuxième partie, il s'agit de comprendre).

tornée vers le
gort tournée vers le courant d'eau
qui à la mer
se combatoit,
et la mers au pié li
batoit, et la mer lui battait le pied.
-v1330
8-Li ponz estoit et forz et hauz, -v1340  
a batailles estoit antor,  
qu'an mi le pont ot une tor,  
et, devant, un pont torneïz,  
qui estoit fez et establiz,  
a ce que sa droiture aporte  
le jor ert ponz, et la nuit, porte. -v1346
Mot Annotation
8-Li PercevalApproches 2.3.6.
ponz estoit et forz et
hauz, Le pont était fort et haut,

Le pont était fort et haut,
flanqué de bastions sur son pourtour,
car au milieu du pont il y avait une tour
et, devant, un pont-levis
qui était construit
pour répondre aux exigences de sa nature
le jour il était pont, et la nuit, porte.

-v1340
a batailles estoit
antor, flanqué de batailles (de bastions) sur son pourtour.

Mais qu'est-ce que des batailles ? Là encore, on aimerait se représenter exactement le pont décrit […]

[…[L'article +bataille du TL 2 comporte une rubrique “plur. batailles Befestigungswerk an einer Mauer, einem Turm”, ce qui veut dire que le pluriel batailles est défini dans ce dictionnaire “ouvrage de défense sur un mur, une tour” ;

les exemples fournis (Perceval n'y est pas) ne permettent pas d'en dire plus, mais montrent que cette définition paraît acceptable

qu'an mi le pont ot
une tor,
et, devant,
un pont torneïz, et, devant, un pont-levis
qui estoit fez et
establiz, qui était fait et établi, qui était construit
a ce que sa droiture
aporte pour répondre aux exigences de sa nature
le jor ert ponz, et la nuit,
porte. le jour il était pont, et la nuit, porte.
-v1346
9-Li vaslez vers le pont chemine. -v1347  
Vestuz d'une robe d'ermine  
s'aloit uns prodom esbatant  
par sus le pont, et si atant  
celui qui vers le pont venoit  
Li prodom an sa main tenoit  
par contenance un bastonet  
et aprés lui vienent vaslet  
dui ; desafublé sont venu. -v1355
Mot Annotation
9-Li vaslez PercevalApproches 2.3.7.
vers le pont
chemine. Le jeune homme s'avance vers le pont.

Le jeune homme s'avance vers le pont.
Vêtu d'un vêtement d'hermine
un gentilhomme se promenait
sur le pont et attendant
celui qui vers le pont venait.
Le gentilhomme tenait à la main
pour se donner de l'importance un bâtonnet
et après lui viennent des pages
au nombre de deux; sans leur manteau.

-v1347
Vestuz d'une robe
d'ermine Vêtu d'un vêtement d'hermine
s'aloit uns prodom
esbatant un gentilhomme se promenait
par sus le pont, et si
atant sur le pont et attendant
celui qui vers le pont
venoit celui qui vers le pont venait.
Li prodom an sa main
tenoit Le gentilhomme tenait à la main
par contenance
un bastonet pour se donner de l'importance un bâtonnet
et aprés lui vienent
vaslet et après lui viennent des pages
dui ; desafublé sont
venu. au nombre de deux; sans leur manteau.
-v1355
10-Cil qui vient a bien retenu -v1356  
ce que sa mere li aprist  
car il le salua et dist  
“Sire, ce m'anseigna ma mere  
— Dex beneïe toi, biau frere”  
fet li prodom qui le vit sot.  
— au parler le conut et sot—  
et dit : “Biax frere, don viens tu?  
— Dont ? De la cort le roi Artu. -v1364  
 
.../4
Mot Annotation
10-Cil PercevalApproches 2.3.8.
qui vient a bien
retenu Celui qui vient a bien retenu

Celui qui vient a bien retenu
ce que sa mère lui avait appris
car il le salua et dit
Sire, c'est ce que ma mère m'enseigna.
—Que Dieu te bénisse, cher frère,”
fait le gentilhomme, qui vit qu'il était sot
—à son parler comprit qu'il était sot
et dit: “Cher frère, d'où viens-tu?
— d'où? De la cour du roi Arthur.

-v1356
ce que sa mere
li aprist ce que sa mère lui avait appris
car il le salua et
dist car il le salua et dit
“Sire, ce m'anseigna ma
mere “Sire, c'est ce que ma mère m'enseigna.
— Dex beneïe toi, biau
frere” —Que Dieu te bénisse, cher frère,”
fet li prodom qui le vit
sot. fait le gentilhomme, qui vit qu'il était sot
— au parler le conut et
sot— —à son parler comprit qu'il était sot—
et dit : “Biax frere, don
viens tu? et dit: “Cher frère, d'où viens-tu?
— Dont ? De la cort
le roi Artu. — d'où? De la cour du roi Arthur.
-v1364
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Mot Annotation
PERCEVAL
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voix: May Plouzeau
 
CHAPITRE 3  
11-et tantost .IIII. sergent vindrent -v1737  
qui granz haiches a lor cos tindrent,  
et chascuns ot ceinte une espee,  
si ont la porte desfermee  
et dient : “Sire, venez anz -v1741
Mot Annotation
voix: May Plouzeau
CHAPITRE 3
11-et PercevalApproches 3.3.2.
tantost .IIII. sergent
vindrent et aussitôt arrivèrent quatre sergents

et aussitôt arrivèrent quatre sergents
qui portaient de grandes haches au cou,
et chacun portait une épée,
ils ouvrirent la porte
et lui dirent : “Sire, avancez. ”

-v1737
qui granz haiches a lor cos
tindrent, qui portaient de grandes haches au cou,
et chascuns ot ceinte une
espee, et chacun portait une épée,
si ont la porte
desfermee ils ouvrirent la porte
et dient : “Sire, venez
anz et lui dirent : “Sire, venez avant. ”
(Sire, avancez)
-v1741
12-Se bien esteüst as sergenz, -v1742  
mout fussent bel, mes il avoient  
meseise eü tant qu'il estoient  
tel qu'an s'an poïst merveiller,  
de geüner et de veillier. -v1746
Mot Annotation
12-Se bien PercevalApproches 3.3.3.
esteüst Se bien esteüst as sergenz, mout fussent bel.

Se est conjonction de subordination “si”.

Nous avons un système conditionnel dont les deux verbes sont au subjonctif imparfait.

Une traduction littérale serait “si la situation avait été bonne pour les sergenz, ils auraient été très beaux”.

Or, il n'en est rien : l'hypthèse porte sur un fait passé qui s'est révélé faux (quand on décrivait la syntaxe du latin en mon enfance, on parlait, au plan notionnel, d'irréel du passé) ;

le résultat de cette hypothèse s'est également révélé faux.

Pour exprimer cela, l'ancien français dispose d'un système très simple : +se + subjonctif imparfait dans la subordonnée // subjonctif imparfait dans la principale.

as
sergenz, Si la situation fût bonne pour les sergents,
(Si la situation avait été bonne pour les sergents)

Si la situation avait été bonne pour les sergents
ils auraient été très beaux, mais ils avaient
eu tant de déboires
qu'on aurait pu s'en étonner,
mais ils avaient tant souffert de jeunes et de veilles que c'était pitié de les voir.

-v1742
mout fussent bel, mes il
avoient ils fussent très beaux, mais ils avaient

(ils auraient été très beaux, mais ils avaient)

meseise eü tant qu'il
estoient eu tant de déboires
tel qu'an s'an poïst
merveiller, qu'on aurait pu s'en étonner
de geüner et de
veillier. Mais ils avaient tant souffert de jeunes et de veilles que c'était pitié de les voir.
-v1746
13-Et s'il ot bien defors trovee -v1747  
la terre gaste et escovee  
dedanz rien ne li amanda,  
que par tot la ou il ala  
trova anhermies les rues  
et les meisons viez decheües,  
qu'home ne fame n'i avoit -v1753
Mot Annotation
13-Et s'il PercevalApproches 3.3.4.
ot bien defors
trovee Et s'il avait trouvé dehors

Et s'il avait trouvé dehors
la terre nue et déserte,
à l'intérieur cela ne s'arrangea pas pour lui,
partout où il alla
il trouva les rues désertes
et les maisons vieilles et en ruines
dans des conditions telles qu'il n'y avait ni homme ni femme.

-v1747
la terre gaste et
escovee la terre nue et déserte,
dedanz rien ne li
amanda, à l'intérieur cela ne s'arrangea pas pour lui,
que par tot la ou il
ala partout où il alla
trova anhermies
les rues il trouva les rues désertes
et les meisons viez
decheües, et les maisons vieilles et en ruines
qu'home ne fame n'i
avoit dans des conditions telles qu'il n'y avait ni homme ni femme.
-v1753
14-.II. mostiers an la ville avoit, -v1754  
qui estoient .II. abaïes,  
li uns de nonains esbaïes,  
l'autres de moinnes esgarez.  
Ne trova mie bien parez  
les mostiers ne bien portanduz  
ençois vit crevez et fanduz  
les murs, et les torz decovertes,  
et les meisons erent overtes  
ausi de nuiz come de jorz. -v1763
Mot Annotation
14-.II. PercevalApproches 3.3.5.
mostiers Voir l'impressionnant site du village de Moustiers Sainte-Marie en Provence.

Le mot mostier est issu du latin :

lat. monast'erium donne AF mostier par voie d'usure phonétique prononcée (tandis que par emprunt savant lat. monast'erium donne monastère) ;

mostier signifie à l'origine “monastère”, “couvent”.

Mostier a évolué en moutier, mot qui ne survit plus que régionalement ou dans des noms de lieu.

Très souvent mostier signifie “lieu de culte”, et alterne avec eglise en ce sens.

an la ville
avoit, Il y avait en la ville deux moustiers.

Il y avait en la ville deux moustiers,
qui étaient deux abbayes,
l'un de religieuses effrayées
l'autre de moines désemparés.
Ces moustiers, il ne les trouva pas bien parés (décorés)
ni ornés de tentures
mais (les murs) en étaient fendus et crevés
et les tours sans toiture
et les maisons étaient ouvertes
autant de nuit que de jour.

-v1754
qui estoient .II.
abaïes, qui étaient deux abbayes,
li uns de
nonains Traduire par “religieuses” parce que FM nonne est vieux ou plaisant : voir Petit Robert 1993 p1497a.

Le chanteur Georges Brassens s'amuse quand dans Le mauvais sujet repenti il fait rimer nonne avec Sorbonne.

esbaïes, l'un de religieuses effrayées
l'autres de moinnes
esgarez. l'autre de moines désemparés.
Ne trova mie bien
parez ces moustiers, il ne les trouva pas bien parés (décorés)
les mostiers ces moustiers, il ne les trouva pas bien parés (décorés)
ne bien
portanduz ni ornés de tentures
ençois Nous avons ici un cas d'emploi très fréquent du mot ainçois :

après une proposition négative, il reformule de façon positive et il précise le contenu de la proposition négative.

En ce sens, il fonctionne comme l'allemand sondern.

On peut le gloser par “au contraire”, “bien plus” et le traduire par “mais”.

vit crevez et
fanduz mais (les murs) en étaient fendus et crevés
les murs, et les torz
decovertes, et les tours sans toiture
et les meisons erent
overtes et les maisons étaient ouvertes
ausi de nuiz come de
jorz.
-v1763
15-Molins n'i mialt ne n'i cuist forz -v1764  
an nul leu de tot le chastel  
ne ne trova pain ne gastel,  
ne rien nule qui fust a vandre,  
don l'an poïst un denier prandre.  
Ensi trova le chastel gaste.  
que n'i trova ne pain ne paste  
ne vin ne sidre ne cervoise. -v1771  
 
.../5
Mot Annotation
15-Molins PercevalApproches 3.3.6.
n'i mialt ne n'i cuist
forz Là, moulin ne moud ni four ne cuit

Là, moulin ne moud ni four ne cuit
en nul lieu de tout le château,
et il ne trouva ni pain ni gâteau
et (il ne trouva) absolument rien qui fût à vendre
dont on pût tirer un denier.
Ainsi il trouva le château abandonné,
car il n'y trouva ni pain ni pâte
ni vin, ni cidre ni cervoise

-v1764
an nul leu de tot le
chastel en nul lieu de tout le château,
ne ne trova pain ne
gastel, et il ne trouva ni pain ni gâteau
ne rien nule qui fust a
vandre, et (il ne trouva) absolument rien qui fût à vendre
don l'an poïst un denier
prandre. dont on pût tirer un denier.
Ensi trova le chastel
gaste. Ainsi il trouva le château abandonné,
que n'i trova ne pain ne
paste car il n'y trouva ni pain ni pâte
ne vin ne sidre ne
cervoise.
-v1771
.../5
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Mot Annotation
PERCEVAL
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voix: May Plouzeau
 
16-Vers un palés couvert d'atoise -v1772  
l'ont li .IIII. sergent mené  
et descendu et desarmé.  
Et tantost uns vaslez avale  
par mi les degrez de la sale,  
qui aporta un mantel gris  
au col au chevalier l'a mis,  
et uns autres a establé  
son cheval la ou il n'ot blé  
ne fain ne fuerre se po non,  
que il n'estoit an la meison.  
Li autre devant ax le font  
monter par les degrez amont  
an la sale qui mout fu bele. -v1785
Mot Annotation
voix: May Plouzeau
16-Vers PercevalApproches 3.3.7.
un palés couvert
d'atoise Vers un palais couvert d'ardoise

Vers un palais couvert d'ardoise
les quatre sergents l'ont mené
et descendu de cheval.
Et aussitôt un jeune homme accourt
par l'escalier de la salle,
et apporte un manteau gris
(et) l'a mis au cou du chevalier,
et un autre a mené à l'écurie
son cheval, là où il n'y avait céréales
ni foin, ni paille, sinon en petite quantité
car il n'y en avait pas dans la maison.
Les autres devant eux le font
monter par l'escalier qui le conduit plus haut
dans la salle qui était très belle.

-v1772
l'ont li .IIII. sergent
mené les quatre sergents l'ont mené
et descendu et
desarmé. et descendu de cheval.
Et tantost uns vaslez
avale Et aussitôt un jeune homme accourt
par mi les degrez de
la sale, par l'escalier de la salle,
qui aporta un mantel
gris et apporte un manteau gris;

Attention ! L'adjectif gris peut signifier “de couleur grise” mais aussi “fait de la fourrure du petit-gris”.

Parfois, le contexte ne permet pas de décider.

Ici, Chrétien a voulu donner une impression de désolation, mais le palés v1772 avec son atoise v1772° est épargné :

nous verrons v1797 et suivants que les fourrures abondent.

Donc il vaut sans doute mieux comprendre “fait de la fourrure du petit-gris”.

Le petit-gris est une variété d'écureuil très appréciée dans la pelleterie du Moyen Âge.

au col au chevalier
l'a mis, (et) l'a mis au cou du chevalier,
et uns autres a
establé et un autre a mené à l'écurie
son cheval la ou il
n'ot blé son cheval, là où il n'y avait céréales
ne fain ne fuerre se
po non, ni foin, ni paille, sinon en petite quantité
que il n'estoit an
la meison. car il n'y en avait pas dans la maison.
Li autre devant ax
le font Les autres devant eux le font
monter par les degrez
amont monter par l'escalier qui le conduit plus haut
an la sale qui mout fu
bele.
-v1785
17.Dui prodome et une pucele -v1786  
li sont a l'ancontre venu.  
Li prodome estoient chenu,  
ne pas si que tuit fussent blanc.  
De bel aaige a tot lor sanc  
et a tote lor force fussent,  
s'enui et pesance n'eüssent, -v1792
Mot Annotation
17.Dui PercevalApproches 3.3.8.
prodome et
une pucele Deux gentilshommes et une jeune fille
(il s'agit de Blancheflor)

Deux gentilshommes et une jeune fille
sont venus à sa rencontre.
Les gentilshommes étaient chenus,
mais pas au point d'être entièrement blancs de cheveux.
Dans la force de l'âge avec tout leur sang
et avec toute leur force, voilà ce qu'ils auraient été
s'ils n'avaient eu contrariété et déplaisir.

-v1786
li sont a l'ancontre
venu. sont venus à sa rencontre.
Li prodome estoient
chenu, Les gentilshommes étaient chenus,
ne pas si que tuit fussent
blanc. mais pas au point d'être entièrement blancs de cheveux.
De bel aaige a tot
lor sanc Dans la force de l'âge avec tout leur sang
et a tote lor force
fussent, et avec toute leur force, voilà ce qu'ils auraient été
s'enui et pesance
n'eüssent, s'ils n'avaient eu contrariété et déplaisir.
-v1792
18-et la pucele vint plus jointe, -v1793  
plus acesmeë et plus cointe  
que espreviers ne papegauz  
Ses mantiax fu, et ses bliauz,  
d'une porpre noire, estelee  
de vair, et n'ert mie pelee  
la pane qui d'ermine fu.  
D'un sebelin noir et chenu,  
qui n'estoit trop lons ne trop lez,  
fu li mantiax au col orlez ; -v1802
Mot Annotation
18-et PercevalApproches 3.3.9.
la pucele vint plus
jointe, et la jeune fille vint, plus gracieuse

et la jeune fille vint, plus gracieuse
et plus élégante qu'épervier ou perroquet.
Son manteau, de même que sa tunique
étaient faits d'une somptueuse étoffe sombre, étoilée
de fourrure de vair et elle n'était point pelée
la fourrure qui était d'hermine.
D'une zibeline noire et grise
qui n'était ni trop longue, ni trop large
le manteau était ourlé au niveau du cou;

-v1793
plus acesmeë et plus
cointe et plus élégante
que espreviers ne
papegauz qu'épervier ou perroquet.

Une chose est certaine : en comparant les qualités de la jeune fille à celle d'un épervier (esprevier), Chrétien reste dans la tradition.

N'oublions pas que les oiseaux de fauconnerie sont des oiseaux nobles, que la classe aristocratique les avait sans cesse sous les yeux et sur le poing, et que pour elle, prendre comme point de comparaison un épervier est tout à fait parlant.

Mais avec le perroquet (papegauz v1795 ; lemme du TL, papegai), Chrétien détonne et s'amuse (selon moi), au point que la comparaison a été reprise dans le portrait d'une héroïne de fabliau, Guillaume au faucon, dont fait état le Glossaire sv passemervoille.

En choisissant Arielle Dombasle pour incarner Blancheflor dans son Perceval le gallois (1978), le cinéaste Éric Rohmer a été bien inspiré ;

voilà une actrice impeccable sur elle et qui joue souvent des personnages que les réalisateurs traitent avec humour (par exemple L'ennui de Cédric Kahn, film de 1998).

Ses mantiax fu, et ses
bliauz, Son manteau, de même que sa tunique
d'une porpre noire,
estelee étaient faits d'une somptueuse étoffe sombre, étoilée.
de
vair, de fourrure de vair

Le mot a pour origine l'adjectif vair, qui signifie dans le domaine de la couleur “qui présente des couleurs variées” (vair vient du lat. v'arium) ;

substantivé, comme ici, le mot vair désigne la fourrure de fourrure de vair

Le mot a pour origine l'adjectif vair, qui signifie dans le domaine de la couleur “qui présente des couleurs variées” (vair vient du lat. v'arium) ;

substantivé, comme ici, le mot vair désigne la fourrure de l'écureuil appelé petit-gris, très précieuse.

De quoi s'agit-il ? “En termes de pelletier-fourreur les faits se présentent ainsi : le vrai vair, la peau du Sciurus varius, est bicolore. Le centre (le dos), au poil dense, est gris cendre ou plus foncé, le pourtour (le ventre), et surtout vers le bas, est blanc et nettement contrasté.”
Mélanges de lexicographie et de linguistique françaises et romanes dédiés à la mémoire de Manfred Höfler (1997), pp 306-307.

On lira avec intérêt la contreverse vair / verre sur la composition des pantoufles de Cendrillon dans Wikipédia.

et n'ert mie
pelee et elle n'était point pelée
la pane qui d'ermine
fu. la fourrure qui était d'hermine.
D'un
sebelin la zibeline est une fourrure précieuse, comme l'hermine ou le vison.
noir et
chenu, d'une zibeline noire et grise
qui n'estoit trop lons ne trop
lez, qui n'était ni trop longue, ni trop large
fu li mantiax au col
orlez ; le manteau était ourlé au niveau du cou;
-v1802
19-et se je onques fis devise -v1803  
an biauté que Dex eüst mise  
an cors de fame ne an face,  
or me plest que une an reface  
ou ge ne mantirai de mot. -v1807
Mot Annotation
19-et PercevalApproches 3.3.10.
se je onques fis
devise et si j'ai jamais donné une description

et si j'ai jamais donné une description
de la beauté que Dieu a pu mettre
dans un corps ou un visage de femme,
il me plaît maintenant d'en refaire une
dans laquelle je ne mentirai pas d'un mot.

-v1803
an biauté que Dex eüst
mise de la beauté que Dieu a pu mettre
an cors de fame ne an
face, dans un corps ou un visage de femme,
or me plest que une an
reface il me plaît maintenant d'en refaire une
ou ge ne mantirai de
mot. dans laquelle je ne mentirai pas d'un mot.
-v1807
20-Deslïee fu, et si ot -v1808  
les chevox tex, s'estre poist,  
que bien cuidast qui les veist  
que il fussent tuit de fin or,  
tant estoient luisant et sor.  
Le front ot blanc et haut et plain  
com se il fust ovrez de main,  
que de main d'ome l'uevre fust.  
de pierre ou d'ivoire ou de fust.  
Sorcix brunez et large ant'ruel,  
an la teste furent li oel  
riant et veir et cler fandu.  
Le nés ot droit et estandu.  
et mialz li avenoit el vis  
li vermauz sor le blanc asis  
que li sinoples sor l'argent. -v1823
Mot Annotation
20-Deslïee PercevalApproches 3.3.11.
fu, et
si ot Elle (Blancheflor) avait la tête découverte

Elle (Blancheflor) avait la tête découverte
et les cheveux tels que celui qui les aurait vus
aurait cru qu'ils étaient tout d'or fin,
tant ils étaient blonds et brillants.
Son front était blanc, haut et lisse
comme s'il avait été ouvré à la main,
ouvré de main d'homme,
dans le marbre, l'ivoire ou le bois.
(Elle avait) des sourcils bruns et largement espacés
des yeux riants et vairs, et nettement fendus.
Son nez formait une ligne bien droite,
et sur son visage mieux lui seyait
la couleur vermeille contrastée avec le blanc
que la couleur sinople sur l'argent.

-v1808
les chevox tex, s'estre
poist, et les cheveux tels
que bien cuidast qui les
veist que celui qui les aurait vus aurait cru
que il fussent tuit
de fin or, qu'ils étaient tout d'or fin,
tant estoient luisant
et sor. tant ils étaient blonds et brillants.
Le front ot blanc et haut et
plain Son front était blanc, haut et lisse
com se il fust ovrez de
main, comme s'il avait été ouvré à la main,
que de main d'ome l'uevre
fust. ouvré de main d'homme
de pierre ou d'ivoire ou de
fust. dans le marbre, l'ivoire ou le bois.
Sorcix brunez et large
ant'ruel, (elle avait) des sourcils bruns et séparés par un large entr'œil,
an la teste furent
li oel elle avait des yeux
riant et
veir Ici, nous avons l'adjectif vair, qui, dans le domaine de la couleur, signifie étymologiquement “qui présente des couleurs variées” (cf. commentaire du v1798 supra dans le présent ◊Chap3 §79a).

Toutefois, le sens de l'adjectif quand il est incident au mot ueil n'est pas facile à déterminer.

Les yeux des belles personnes sont traditionnellement qualifiés de vairs dans les textes littéraires (cf. par exemple l'article vair du TL), mais les auteurs ne précisent pas ce qu'ils entendent par là.

Ce que l'on peut dire, c'est que ueil vair n'est pas interchangeable pour le sens avec ueil noir (j'ai écrit les syntagmes au CSP, dans la graphie du TL), grâce à Adam de la Halle, Si noir oeil me sanloient vair.

Par ailleurs, “le fait que vair (incident à ueil) est fort souvent accompagné des mots cleret riant montre qu'il ne s'agit probablement pas de la couleur des yeux, mais de leur expression : vif, animé, expressif” (FouletPerceval p312).

Cette interprétation a l'intérêt de conserver un certain lien sémantique avec l'étymon de vair, lat. v'arium: un regard animé est changeant.

et
cler fandu. riants et vairs, et nettement fendus.
Le nés ot droit et
estandu. Son nez formait une ligne bien droite,
et mialz li avenoit
el vis et sur son visage mieux lui seyait
li
vermauz Les mots vermeil et sinople réfèrent tous deux à une couleur.

Nous ne pouvons pas rendre sinoples par FM sinople, parce qu'aujourd'hui ce mot désigne “un des émaux héraldiques, de couleur verte” (PetitRobert1993 p2095b).

Le mot sinople à l'origine désigne une couleur rouge, puis désigne une couleur verte.

Le changement de sens se fait au cours du Moyen Âge : dans certains textes on ne peut savoir à quoi réfère sinople, mais ici le passage est éclairant : il désigne une couleur rouge.

Le mot vermeil désigne un rouge vif : dans les textes qui utilisent à la fois le mot +roge et le mot vermeil, on voit que vermeil est connoté positivement, ce qui n'est pas le cas de roge.

Dans PercL nous avons en tout 22 occurrences de vermeil (nom ou adjectif) contre seulement deux de sinople.

Nous pouvons en déduire que sinople est plus recherché que vermeil, et peut-être même que c'est déjà un terme technique, lié à la couleur des armoiries.

En effet, l'autre occurrence de sinopleest la suivante : Les armes de sinople taintes Au chevalierv1219.

À la lumière de ces informations (et des informations qui vous sont fournies dans le ◊Glossaire), je propose de traduire “et sur son visage l'incarnat rehaussant la blancheur était plus seyant que gueules sur champ d'argent”.

sor le blanc
asis la couleur vermeille contrastée avec le blanc

La forme vermeil (ou dans certaines régions de l'Est vermoil) provient par évolution phonétique régulière du lat. verm'iculum, qui signifie “petit ver” (vous reconnaissez le radical de AF verm commenté ◊Chap2 §56).

Cette petite bête broyée donnait une teinture rouge, au point que le descendant de lat. verm'iculum a pu concurrencer les descendants du radical de lat. r'uber pour signifier “rouge” dans certaines langues romanes.

que li sinoples sor
l'argent. que la couleur sinople sur l'argent.

ou bien

“et sur son visage l'incarnat rehaussant la blancheur était plus seyant que gueules sur champ d'argent”.

-v1823
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Mot Annotation
PERCEVAL
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CHAPITRE 4  
 
21-Por anbler san et cuer de gent -v1824  
fist Dex de li passemervoille,  
n'onques puis ne fist la paroille  
ne devant feite ne l'avoit. -v1827
Mot Annotation
CHAPITRE 4
21-Por PercevalApproches 4.3.1.
anbler san et cuer de
gent Pour ravir la raison et le cœur des gens

Pour ravir la raison et le cœur des gens
Dieu avait fait d'elle un tel prodige,
et depuis il n'en a pas fait de pareille
non plus qu'il n'en avait fait auparavant.

-v1824
fist Dex de li
passemervoille, Dieu avait fait d'elle un tel prodige,
n'onques puis ne fist la
paroille et depuis il n'en a pas fait de pareille
ne devant feite ne
l'avoit. non plus qu'il n'en avait fait auparavant.
-v1827
22-Et quant li chevaliers la voit, -v1828  
si la salue, et ele, lui  
et li chevalier amedui  
et la dameisele le prant  
par la main debonerement -v1832
Mot Annotation
22-Et quant PercevalApproches 4.3.2.
li chevaliers la
voit, Et quand le chevalier la voit

Et quand le chevalier la voit
il la salue et elle lui rend son salut,
et les deux autres chevaliers saluent en même temps
alors la demoiselle le prend
par la main aimablement,

-v1828
si la salue, et
ele, lui il la salue et elle lui rend son salut,
et li chevalier
amedui et les deux autres chevaliers saluent en même temps
et la dameisele le
prant alors la demoiselle le prend
par la main
debonerement par la main aimablement,
-v1832
23-et dist : “Biau frere, vostre ostex -v1833  
certes n'iert pas anquenuit tex  
com a prodome covandroit  
Mes qui vos diroit orandroit  
tot nostre covine et nostre estre,  
vos cuidereiez, puet cel estre,  
que de malvestié le deisse  
por ce qu'aler vos an feïsse.  
Mes se vos plest or remenez,  
l'ostel tel com il est prenez,  
et Dex vos doint meillor demain.” -v1843
Mot Annotation
23-et dist : PercevalApproches 4.3.3.
“Biau frere, vostre
ostex Et dit: “Beau seigneur, votre logement

Et dit: “Beau seigneur, votre logement
ne sera pas cette nuit, assurément,
comme il le faudrait pour un homme de bien.
Mais si l'on vous disait maintenant
tout sur notre situation et notre état
vous croiriez peut-être
que je le dirais par méchanceté
pour que je vous fasse partir.
Mais si cela vous plaît, restez
et acceptez notre hospitalité comme elle est,
et que Dieu vous en procure une meilleure demain.“

-v1833
certes n'iert pas anquenuit
tex Mais si l'on vous disait maintenant
com a prodome
covandroit comme il le faudrait pour un homme de bien.
Mes qui vos diroit
orandroit Mais si l'on vous disait maintenant
tot nostre covine et nostre
estre, tout sur notre situation et notre état
vos cuidereiez, puet cel
estre, vous croiriez peut-être
que de malvestié le
deisse que je le dirais par méchanceté
por ce qu'aler vos an
feïsse. pour que je vous fasse partir.
Mes se vos plest or
remenez, Mais si cela vous plaît, restez
l'ostel tel com il est
prenez, et acceptez notre hospitalité comme elle est,
et Dex vos doint meillor
demain.” et que Dieu vous en procure une meilleure demain.
-v1843
24-Ensi l'an mainne par la main -v1844  
jusqu'an une chanbre celee  
qui mout ert bele et longue et lee.  
Sor une coute de samit  
qui fu tandue sor un lit  
se sont leanz andui asis.  
Chevalier quatre, cinc et sis  
vindrent leanz et si se sistrent  
tot par tropeax et mot ne distrent,  
et virent celui qui se sist  
delez lor dame et mot ne dist.  
Por ce de parler se tenoit  
que del chasti li sevenoit  
que li prodom li avoit fet,  
s'an tenoient antr'ax grant plet  
tuit li chevalier a consoil. -v1859
Mot Annotation
24-Ensi PercevalApproches 4.3.4.
l'an mainne par
la main Elle l'emmène ainsi par la main

Elle l'emmène ainsi par la main
jusqu'à une chambre au plafond doré (peint ou à caissons)
qui était très belle, longue et large.
Sur une courtepointe de riche étoffe de soie
qui était étendue sur un lit
ils se sont assis tous les deux.
Quelques chevaliers, quatre, cinq, puis six,
par petits groupes sans dire mot
entrèrent dans la pièce et s'assirent
et virent celui qui était assis
aux côtés de leur dame et ne disait mot.
Il se retenait de parler
parce qu'il se souvenait du conseil
que le gentilhomme lui avait donné
et tous les chevaliers en parlaient
entr'eux à voix basse :

-v1844
jusqu'an une chanbre
celee jusqu'à une chambre au plafond orné

ATTENTION!

Celee ici n'est pas 'cachée'.

Voir l'article celer2 du Lexique du Dictionnaire Électronique de Chrétien de Troyes (Déct) http://www.atilf.fr/dect/ de Pierre Kunstmann:
'[...] Part. passé en empl. adj. "Pourvu d'un ' ciel ' ou plafond orné" (Définition empruntée à Foulet) [...]'

Voir aussi la note au vers 1847 de l'édition de Perceval par Keith Busby publiée à Tübingen (Max Niemeyer) en 1993.

qui mout ert bele et longue
et lee. qui était très belle, longue et large.
Sor une coute de
samit Sur une courtepointe de riche étoffe de soie
qui fu tandue sor
un lit qui était étendue sur un lit
se sont leanz andui
asis. ils se sont assis tous les deux.
Chevalier quatre, cinc
et sis Quelques chevaliers, quatre, cinq, puis six,
vindrent leanz et si
se sistrent entrèrent dans la pièce et s'assirent
tot par tropeax et mot ne
distrent, par petits groupes sans dire mot
et virent celui qui
se sist et virent celui qui était assis
delez lor dame et mot
ne dist. aux côtés de leur dame et ne disait mot.
Por ce de parler
se tenoit Il se retenait de parler
que del chasti li
sevenoit parce qu'il se souvenait du conseil
que li prodom li
avoit fet, que le gentilhomme lui avait donné
s'an tenoient antr'ax
grant plet et tous les chevaliers en parlaient
tuit li chevalier
a consoil. entr'eux à voix basse :
-v1859
25-“Dex, fet chascuns, mout me mervoil -v1860  
se cil chevaliers est muiax.  
Granz diax seroit, c'onques si biax  
chevaliers ne fu nez de fame.  
Mout avient bien delez ma dame,  
et ma dame ausi delez lui.  
S'il ne fussent muël andui,  
tant est cil biax et cele bele  
c'onques chevaliers ne pucele  
si bien n'avindrent mes ansanble,  
que de l'un et de l'autre sanble  
que Dex l'un por l'autre feïst  
por ce qu'ansanble les meïst.” -v1872
Mot Annotation
25-“Dex, PercevalApproches 4.3.5.
fet chascuns, mout
me mervoil “Dieu, disait chacun, je me demande vraiment

“Dieu, disait chacun, je me demande vraiment
si ce chevalier est muet.
Ce serait grand dommage car jamais aussi beau
chevalier ne fut né de femme.
Il forme un beau couple à côté de ma dame
et ma dame aussi à côté de lui.
Si seulement ils n'étaient pas muets tous les deux
il est si beau et elle si belle
que jamais chevalier et jeune fille
ne furent si bien accordés
car au sujet de l'un et de l'autre, il semble,
que Dieu les fit l'un pour l'autre
pour les mettre ensemble. ”

-v1860
se cil chevaliers est
muiax. si ce chevalier est muet.
Granz diax seroit, c'onques
si biax Ce serait grand dommage car jamais aussi beau
chevaliers ne fu nez de
fame. chevalier ne fut né de femme.
Mout avient bien delez
ma dame, Il forme un beau couple à côté de ma dame,
et ma dame ausi
delez lui. et ma dame aussi à côté de lui.
S'il ne fussent muël
andui, Si seulement ils n'étaient pas muets tous les deux
tant est cil biax et
cele bele il est si beau et elle si belle
c'onques chevaliers ne
pucele que jamais chevalier et jeune fille
si bien n'avindrent mes
ansanble, ne furent si bien accordés
que de l'un et de l'autre
sanble car au sujet de l'un et de l'autre, il semble
que Dex l'un por l'autre
feïst que Dieu les fit l'un pour l'autre
por ce qu'ansanble les
meïst.” pour les mettre ensemble. ”
-v1872
26-Et tuit cil qui leanz estoient -v1873  
antr'ax grant parole an feisoient  
et la dameisele atandoit  
qu'il l'aparlast de que que soit,  
tant qu'ele vit tres bien et sot  
que il ne li diroit ja mot  
s'ele ne l'aresnoit avant, -v1879
Mot Annotation
26-Et tuit PercevalApproches 4.3.6.
cil qui leanz
estoient Et tous ceux qui étaient là rassemblés

Et tous ceux qui étaient là rassemblés
en faisaient le sujet de leur conversation
et la demoiselle attendait
qu'il lui parle de quoi que ce soit
au point qu'elle comprit très bien
qu'il ne lui dirait pas un mot
si elle ne lui adressait pas la parole la première

-v1873
antr'ax grant parole an
feisoient en faisaient le sujet de leur conversation
et la dameisele
atandoit et la demoiselle attendait
qu'il l'aparlast de que
que soit, qu'il lui parle de quoi que ce soit
tant qu'ele vit tres bien
et sot au point qu'elle comprit très bien
que il ne li diroit
ja mot qu'il ne lui dirait pas un mot
s'ele ne l'aresnoit
avant, si elle ne lui adressait pas la parole la première
-v1879
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CHAPITRE 5  
27-et dist mout debonerement -v1880  
“Sire, don venistes vos hui?  
— Dameisele, fet il, je jui  
chiés un prodome an un chastel,  
ou j'oi ostel et bon et bel,  
s'i a .V. torz forz et eslites,  
une grant et .IIII. petites.  
Ne sai tote l'uevre asomer  
ne le chastel ne sai nomer,  
mes je sai bien que li prodon  
Gornemanz de Gohorz a non. -v1890
Mot Annotation
CHAPITRE 5
27-et dist PercevalApproches 5.2.1.
mout
debonerement et elle lui dit donc très aimablement

et elle lui dit donc très aimablement
“Seigneur, d'où êtes-vous arrivé aujourd'hui?
—Demoiselle, fait-il, j'ai passé la nuit
chez un gentilhomme dans un château,
où j'eus bel et bon logement,
ce château a cinq tours fortes et bien construites
une grande et quatre petites.
Je ne saurais énumérer toutes les parties de l'ouvrage
ni dire le nom du château
mais je sais bien que le gentilhomme
a pour nom Gornemant de Goort

-v1880
“Sire, don venistes vos
hui? “Seigneur, d'où êtes-vous arrivé aujourd'hui?
— Dameisele, fet il,
je jui —Demoiselle, fait-il, j'ai passé la nuit
chiés un prodome an un
chastel, chez un gentilhomme dans un château,
ou j'oi ostel et bon et
bel, où j'eus bel et bon logement,
s'i a .V. torz forz et
eslites, ce château a cinq tours fortes et bien construites
une grant et .IIII.
petites. une grande et quatre petites.
Ne sai tote l'uevre
asomer Je ne saurais énumérer toutes les parties de l'ouvrage
ne le chastel ne sai
nomer, ni dire le nom du château
mes je sai bien que li
prodon mais je sais bien que le gentilhomme
Gornemanz de Gohorz
a non. a pour nom Gornemant de Goort.
-v1890
28— Ha ! biax amis, fet la pucele -v1891  
mout est vostre parole bele  
et mout avez dit que cortois.  
Gré vos an sache Dex li rois  
qant vos prodome l'apelastes.  
Onques plus voir mot ne parlastes,  
qu'il est prodom, par saint Richier,  
ice puis je bien afichier;  
et sachiez que je sui sa niece,  
mes je nel vi mout a grant piece,  
et, certes, puis que vos meüstes  
de vostre ostel, ne queneüstes  
plus prodome mien esciant.  
Mout lié ostel et mout joiant  
vos fist, que il le sot bien feire  
come prodom et deboneire,  
puissanz et aeisiez et riches. -v1907
Mot Annotation
28— Ha ! PercevalApproches 5.2.2.
biax amis, fet
la pucele — Ha ! Cher ami, dit la jeune fille,

— Ha ! Cher ami, dit la jeune fille,
que vos paroles sont belles
et combien courtois ce que vous avez dit.
Que Dieu, le roi du ciel, vous sache gré
quand vous l'appelâtes gentilhomme.
Jamais vous n'avez proféré de parole plus véridique,
car il est gentilhomme, par saint Richier,
je puis bien l'affirmer;
et sachez que je suis sa nièce,
mais il y a très longtemps que je ne l'ai pas vu
et, sans aucun doute, depuis que vous avez quitté
votre maison, vous n'avez rencontré
gentilhomme plus noble, que je sache.
Il vous a réservé un accueil très souriant et joyeux
car il a bien su le faire
comme un gentilhomme aimable
puissant, prospère et riche.

-v1891
mout est vostre parole
bele que vos paroles sont belles
et mout avez dit que
cortois. et combien courtois ce que vous avez dit.
Gré vos an sache Dex
li rois Que Dieu, le roi du ciel, vous sache gré
qant vos prodome
l'apelastes. quand vous l'appelâtes gentilhomme.
Onques plus voir mot ne
parlastes, Jamais vous n'avez proféré de parole plus véridique,
qu'il est prodom, par
saint Richier, car il est gentilhomme, par saint Richier,
ice puis je bien
afichier; je puis bien l'affirmer;
et sachiez que je sui
sa niece, et sachez que je suis sa nièce,
mes je nel vi mout a grant
piece, mais il y a très longtemps que je ne l'ai pas vu
et, certes, puis que vos
meüstes et, sans aucun doute, depuis que vous avez quitté
de vostre ostel, ne votre maison, vous n'avez rencontré
queneüstes votre maison, vous n'avez rencontré
plus prodome mien
esciant. gentilhomme plus noble, que je sache.
Mout lié ostel et mout
joiant Il vous a réservé un accueil très souriant et joyeux
vos fist, que il le sot bien
feire car il a bien su le faire
come prodom et
deboneire, comme un gentilhomme aimable
puissanz et aeisiez et
riches. puissant, prospère et riche.
-v1907
29-“Mes ceanz n'a mes que .VI. miches -v1908  
c'uns miens oncles, qui est prieus,  
mout sainz hom et religieus  
m'anvea por soper enuit,  
et un bocel plain de vin cuit.  
De vitaille n'a plus ceanz,  
fors un chevrel c'uns miens sergenz  
ocist hui main d'une saiete.”  
Atant comande que l'an mete  
les tables, et eles sont mises,  
et les genz au soper asises. -v1918
Mot Annotation
29-“Mes ceanz PercevalApproches 5.2.3.
n'a mes que .VI.
miches “Mais ici il n'y a que cinq miches

“Mais ici il n'y a que cinq miches qu'un de mes oncles, qui est prieur,
un très saint homme de religion
m'envoya pour notre souper ce soir
avec une outre de vin cuit.
Pour le reste de la nourriture, nous n'avons plus ici
qu'un chevreuil qu'un de mes hommes d'armes
a tué ce matin d'une flèche.“
Alors elle ordonne que l'on dresse les tables,
et une fois les tables mises
les gens s'assoient pour souper.

-v1908
c'uns miens oncles, qui est
prieus, qu'un de mes oncles, qui est prieur,
mout sainz hom et
religieus un très saint homme de religion
m'anvea por soper
enuit, m'envoya pour notre souper ce soir
et un bocel plain de vin
cuit. avec une outre de vin cuit.
De vitaille n'a plus
ceanz, Pour le reste de la nourriture, nous n'avons plus ici
fors un chevrel c'uns miens
sergenz qu'un chevreuil qu'un de mes hommes d'armes
ocist hui main d'une
saiete.” a tué ce matin d'une flèche.“
Atant comande que l'an
mete Alors elle ordonne que l'on dresse les tables,
les tables, et eles sont
mises, et une fois les tables mises
et les
genz En ancien français, le nom gent est féminin au singulier et très souvent féminin aussi au pluriel, conformément au genre de l'étymon, lat. g'ens, g'entis (j'ai cité comme dans le Gaffiot, lequel toutefois n'imprime pas d'accent tonique).

Nous avons gardé un souvenir de cet ancien état de fait : la gent estudiantine, les vieilles gens sont malheureux.

au soper
asises. les gens s'assoient pour souper.
-v1918
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CHAPITRE 6  
30-Au mangier ont mout petit sis, -v1919  
mes par mout grant talant l'ont pris.  
Aprés mangier se departirent ;  
cil remestrent, qui se dormirent  
qui l'autre nuit veillié avoient;  
cil s'an issirent qui devoient  
la nuit par le chastel veillier.  
Sergent furent et escuier  
.L. qui la nuit veillirent;  
li autre mout se traveillierent  
de lor oste bien aeisier. -v1929
Mot Annotation
CHAPITRE 6
30-Au mangier PercevalApproches 6.1.1.
ont mout petit
sis, Ils sont restés assis à table fort peu de temps

Ils sont restés assis à table fort peu de temps
mais ont mangé de grand appétit.
Après le repas ils se séparèrent;
les uns restèrent pour dormir,
ceux qui avaient veillé la nuit d'avant;
les autres sortirent qui devaient
la nuit veiller répartis à travers le château.
Les hommes d'armes et les ecuyers
qui veillèrent la nuit étaient au nombre de cinquante;
les autres s'efforcèrent
de mettre leur hôte bien à l'aise.

-v1919
mes par mout grant talant l'ont
pris. mais ont mangé de grand appétit.
Aprés mangier se
departirent ; Après le repas ils se séparèrent;
cil remestrent, qui se
dormirent les uns restèrent pour dormir,
qui l'autre nuit veillié
avoient; ceux qui avaient veillé la nuit d'avant;
cil s'an issirent qui
devoient les autres sortirent qui devaient
la nuit par le chastel
veillier. la nuit veiller répartis à travers le château.
Sergent furent et
escuier Les hommes d'armes et les ecuyers
.L. qui la nuit
veillirent; qui veillèrent la nuit étaient au nombre de cinquante;
li autre mout se
traveillierent les autres s'efforcèrent
de lor oste bien
aeisier. de mettre leur hôte bien à l'aise.
-v1929
31-Biax dras et covertor mout chier -v1930  
et orellier au chief li mestent  
cil qui del couchier s'antremestent;  
trestot l'eise et tot le delit  
qu'an saüst deviser an lit  
ot li chevaliers cele nuit,  
fors que solement le deduit  
de pucele, se lui pleüst,  
ou de dame, se li leüst.  
Mes il n'an savoit nule rien,  
et por ce vos di ge mout bien  
qu'il s'andormi auques par tans,  
qu'il n'estoit de rien an espans. -v1942  
 
* * * / / / * * *
Mot Annotation
31-Biax dras PercevalApproches 6.1.2.
et covertor mout
chier De beaux draps et une couverture très chers

De beaux draps et une couverture très chers
et un oreiller pour la tête sont mis
par ceux qui sont chargés du coucher
toute l'aise et le plaisir
qu'on eût pu souhaiter en un lit
le chevalier l'eut cette nuit
à l'exception du plaisir
d'une jeune fille, si tel avait été son désir
ou d'une dame, s'il lui avait été permis.
Mais il était encore innocent,
et pour cela je vous dis bien
qu'il s'endormit vite
libre de tout souci.

-v1930
et orellier au chief li
mestent et un oreiller pour la tête sont mis
cil qui del couchier
s'antremestent; par ceux qui sont chargés du coucher;
trestot l'eise et tot le
delit toute l'aise et le plaisir
qu'an saüst deviser
an lit qu'on eût pu souhaiter en un lit
ot li chevaliers
cele nuit, le chevalier l'eut cette nuit
fors que solement le
deduit à l'exception du plaisir

le deduit. Le mot existe encore en français d'aujourd'hui, mais son emploi est qualifié de “vieux” dans PetitRobert1993 p560b.

C'est dire qu'il n'est pas possible de l'utiliser pour rendre le mot deduit du texte, parce qu'à l'époque de Chrétien, l'emploi de ce mot ne créait pas d'effet d'archaïsme.

Concernant ce mot, il est une autre différence entre l'ancien français et le français moderne : dans PetitRobert1993 il est traduit : “Divertissement. Jeux amoureux.”

Et en effet, deduit, se trouve aujourd'hui semble-t-il surtout dans des contextes érotiques.

Or, en ancien français, le mot deduit n'est pas limité à ces seuls contextes : par exemple, l'on parle souvent de deduit d'oiseaus ou de deduit en riviere, en référence au plaisir de la fauconnerie.

de pucele, se lui
pleüst, d'une jeune fille, si tel avait été son désir
ou de dame, se li
leüst. ou d'une dame, s'il lui avait été permis.
Mes il n'an savoit nule
rien, Mais il était encore innocent,
et por ce vos di ge mout
bien et pour cela je vous dis bien
qu'il s'andormi auques par
tans, qu'il s'endormit vite
qu'il n'estoit de rien an
espans. libre de tout souci.
-v1942
* * * / / / * * *