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Le texte écrit est emprunté à l'ouvrage: Rabelais, F. 1534.
Gargantua,
Texte établi et présenté par Jean Plattard, 3e édition revue et corrigée, Société des belles lettres, Paris, 1946.
Il se peut que l'orthographe de cet extrait soit différente de l'orthographe utilisée dans d'autres éditions.
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Rabelais,
dans cet extrait de
Gargantua
(1533-1534 et 1535), fait le récit de la guerre Picrocholine: Frère Jean de Entommeures se bat contre des ennemis venus piller la vigne de son abbaye. C'est un récit littéraire qui témoigne des différents parlers de son temps: langue populaire, dialectes, langue savante et médicale.
[…]
En l'abbaye estoit pour lors un moyne
claustrier,nomméFrère Jean des Entommeures,
[ɑ̃ la.be.i e.tw͜e pur.lɔr œ̃ mw͜ε̃n kla͜w.tri.je nɔ̃.me frεr ʒɑ̃ de zɑ̃.to.mør]
Dans l'abbaye, il y avait pour lors un moine cloîtré, nommé Frère Jean des Entommeures,
jeune, guallant,
frisque,de hayt,bien à
bien à dextre,hardy,
advantureux,délibéré,hault,maigre,
[ʒø̃n ga.lɑ̃ frisk dǝ ε bjε̃ na.dεstr ar.di a.vɑ̃.ty.rø de.li.be.re a͜w mεgr]
jeune, vaillant, alerte, ayant bon cœur, adroit, hardi, aventureux, décidé, fier, maigre,
bien fendu de gueule, bien
advantaigéen nez, beau
despescheurd'heures,
[bjε̃ fɑ̃.dy dǝ gœl bjε̃ na.vɑ̃.te.ʒe ɑ̃ ne bo de.pε.ʃœr dør]
bien fendu de gueule, bien avantagé en nez, capable d'expédier rapidement une tâche,
beau desbrideur de messes, beau
descroteurde
vigiles, [bo de.bri.dør dǝ mεs bo de.krɔ.tør dǝ vi.ʒil]
capable de célébrer rapidement les messes, capable de réciter des vigiles,
pour tout dire sommairement vray moyne si
oncquesen feut
[pur tu dir sɔ̃.mεr.mɑ̃ vrε mw͜ε̃n si ɔ̃k zɑ̃ fy]
pour tout dire, sommairement, un vrai moine s'il en eut une fois
depuys que le monde moynant moyna de moynerie;
[dǝ.pɥi kǝ lǝ mɔ̃d mw͜ε̃.nɑ̃ mw͜ε̃.nɑ de mw͜ε̃.nǝ.ri.ǝ]
depuis que le monde moinant moina de moinerie
au reste clerc
jusquesèsdents en matiere de breviaire. (Chapitre XXVII, p. 97)
[o rεst klεr ʒys.kǝ zεs dɑ̃ ɑ̃ ma.tjεr dǝ bre.vjεr]
au reste, clerc jusqu'aux dents en matière de bréviaire.
[…] il
chocquadoncquessi
roidementsuseulx,sans dyre guare,
[il ʃɔ.kɑ dɔ̃ si rw͜ed.mɑ̃ sy zø sɑ̃ dir gar]
[…] il attaqua donc si fermement sur eux, sans dire gare,
qu'il les renversoit comme porcs, frapant à tors et à travers, à
vieille escrime. [kil le rɑ̃.vεr.sw͜e kɔm pɔr fra.pɑ̃ a tɔr. ze atra.vεr a vjεj εs.krim]
qu'il les renversait comme des porcs, frappant à tort et à travers, à vieille escrime.
Es uns escarbouilloit la cervelle, es
aultresrompoit bras et jambes,
[ε zœ̃ εs.kar.bu.lw͜e la sεr.vεl ε za͜wtr rɔ̃.pw͜e brɑ ze ʒɑ̃b]
Aux uns, il écrabouillait la cervelle; aux autres, il rompait bras et jambes;
es aultres deslochoit les spondyles du coul, es aultres
demoulloitles reins,
[ε za͜wtr dε.lɔ.ʃw͜e le spɔ̃.dil dy ku ε za͜wtr de.mu.lw͜e le rε̃]
aux autres, il disloquait les spondyles du cou; aux autres, il disloquait les reins,
avalloitle nez, poschoit les yeulx, fendoit les mandibules,
[a.va.lw͜e lǝ ne pɔ.ʃw͜e le zjø fɑ̃.dw͜e le mɑ̃.di.byl]
il écrasait le nez, il pochait les yeux, il fendait les mandibules,
enfonçoit les
densen la gueule,
descroulloitles omoplates, sphaceloit les
greves, [ɑ̃.fɔ̃.sw͜e le dɑ̃ zɑ̃ la gœl de.kru.lw͜e le zo.mo.plat sfa.se.lw͜e le grεv]
il enfonçait les dents en la gueule, il défonçait les omoplates, il meurtrissait les jambes,
Si
quelq'unse vouloyt cascherentre les sepes plus
espès, [si kεl.kœ̃ sǝ vu.lw͜e ka.ʃe ɑ̃.trǝ le sεp ply ze.pε]
Si quelqu'un voulait se cacher entre les ceps de vigne plus épais,
à
icelluyfreussoit toute l'areste du
douzet l'esrenoit comme un chien.
[a i.sǝ.lɥi frø.sw͜e tut la.rεt dy du e le.rε.nw͜e kɔm œ̃ ʃjε̃]
à celui-ci il brisait toute la colonne vertébrale et la lui arrachait comme à un chien.
Si
aulcunsaulverse vouloit en fuyant,
si a͜w.kœ̃ sa͜w.ve sǝ vu.lw͜e ɑ̃ fɥi.jɑ̃]
Si quelqu'un voulait se sauver en fuyant,
à icelluy faisoit voler la
testeen pièces par la commissure lambdoïde.
[a i.sǝ.lɥi fǝ.zw͜e vɔ.le la tεt ɑ̃ pjεs par la kɔ.mi.syr lɑ̃.dɔ.id]
à celui-ci il faisait volet la tête en pièces par la commissure lambdoïde (base du crane).
Si quelq'un gravoit en
une (un) arbre,pensant y
estreen
seureté, [si kεl.kœ̃ gra.vw͜e tɑ̃ nœ̃ narbr pɑ̃.sɑ̃ ti εtr ɑ̃ syr.te]
Si quelqu'un montait dans un arbre, pensant y être en sécurité,
icelluy de son
bastonempaloit par le
fondement. [i.sǝ.lɥi dǝ sɔ̃ bɑ.tɔ̃ ɑ̃.pa.lw͜e par lǝ fɔ̃d.mɑ̃]
celui-ci, de son bâton, il empalait par l'anus.
Si quelq'un de sa vieille
congnoissanceluy crioit:
[si kεl.kœ̃ dǝ sa vjεj kɔ̃.nw͜e.sɑ̃s lɥi krij.w͜e]
Si quelqu'un de sa vieille connaissance lui criait:
' Ha,
FrereJean, mon
amy,Frere Jean, je me rend!
[ɑ frεr ʒɑ̃ mɔ̃ na.mi frεr ʒɑ̃ ʒǝ mǝ rɑ̃]
' Ha, Frère Jean, mon ami, Frère Jean, je me rends!
- Il t'est (disoit il) bien
force;mais ensemble tu rendras l'ame à tous les diables ».
[il tε di.zw͜ε til bjε̃ fɔrs mε zɑ̃.sɑ̃bl ty rɑ̃.drɑ lɑ̃:m a tu le djɑ:bl
- Tu es (disait-il) bien obligé; mais ensemble tu rendras l'âme à tous les diables ».
Et
soubdainluy donnoit
dronos.Et, si
personnestant
feust esprinsde
temerité [e su.dε̃ lɥi dɔ̃.nw͜e drɔ.nɔs e si pεr.sɔ̃n tɑ̃ fy te.prε̃ dǝ te.me.ri.te]
Et soudain il lui donnait des coups. Et, si quelqu'un tant fût saisi de témérité
qu'il
luy voulust résisteren face, là
monstroitil la force de ses muscles,
[kil lɥi vu.ly re.zis.te rɑ̃ fas lɑ mɔ̃.tw͜e til la fɔrs de se myskl]
qu'il voulût lui résister en face, là montrait-il la force de ses muscles,
car il
leurstransperçoit la
poictrinepar le mediastine et par le cueur.
[kar il lœr trɑ̃s.pεr.sw͜e la pw͜e.trin par lǝ me.djas.tin et par lǝ kœr]
car il leur transperçait la poitrine par le médiastin et par le cœur.
A d'aultres donnant suz la faulte des
coustes,leurs subvertissoit
l'estomach, [a da͜wtr dɔ̃.nɑ̃ sy la fa͜wt de kut lœr syb.vεr.ti.sw͜e lεs.to.mak]
À d'autres donnant sous la faute des côtes, il leur renversait l'estomac,
et mouroient soubdainement. Es aultres tant fierement frappoit par le nombril
[e mu.rw͜ej su.dε̃n.mɑ̃ ε za͜wtr tɑ̃ fjεr.mɑ̃ fra.pw͜e par lǝ nɔ̃.briʎ]
et ils mouraient soudainement. Aux autres, frappait si férocement par le nombril
qu'il leurs faisoit sortir les tripes. Es aultres parmy les
couillonspersoit le boiau cullier.
[kil lœr fǝ.zw͜e sɔr.tir le trip ε za͜wtr par.mi le ku.ʎɔ̃ pεr.sw͜e lǝ bw͜e.jo ky.ʎe]
qu'il leur faisait sortir les tripes. Aux autres, parmi les couillons, il perçait le rectum.
Croiez que
c'estoitle plus horrible spectacle qu'on veit oncques. ' (Chapitre XXVII, p. 99-110)
[krw͜e.je kǝ se.tw͜e lǝ ply zɔ.ri.blǝ spεk.takl kɔ̃ vi ɔ̃k]
Croyez que c'était le plus horrible spectacle qu'on ne vît jamais. '
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