Français autrefois

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BALZAC (1799 - 1850)
 
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Au XIXe siècle, les parlers de France sont encore très vivants. Des enquêtes faites au début du XIXe siècle montrent la diversité des parlers locaux qui entraîne des difficultés de compréhension d'une région à l'autre. La littérature du XIXe siècle s'ouvre à ces parlers, ainsi qu'aux divers niveaux de langues. George Sand reprend le parler des paysans du Berry, Guy de Maupassant celui des paysans normands, Honoré de Balzac se sert de l'argot des bagnards, note des provincialismes ou des prononciations archaïques. Victor Hugo, Émile Zola font parler les ouvriers et les gens du peuple dans leur langue.  
 
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Dans ' Le Médecin de campagne ', Honoré de Balzac nous fait assister à une veillée paysanne dans une grange d'un petit village de Savoie. Un ancien soldat de Napoléon y fait le récit de la campagne d'Italie, dans son parler paysan.
Pour lors, nous tombe tout maigrelet général en chef à l'armée d'Italie, qui manquait de pain, de munitions, de souliers, d'habits; une pauvre armée nue comme un ver.  
 
— ' Mes amis, qui dit, nous voilà ensemble. Or, mettez-vous dans la boule que d'ici à quinze jours vous serez vainqueurs, habillés à neuf, que vous aurez tous des capotes, de bonnes guêtres, de fameux souliers; mais, mes enfants, faut marcher pour les aller prendre à Milan, où il y en a. '  
 
Et l'on a marché. Le Français, écrasé, plat comme une punaise, se redresse. Nous étions trente mille va-nu-pieds contre quatre-vingt mille fendants d'Allemands, tous beaux hommes, bien garnis, que je vois encore. Alors Napoléon, qui n'était encore que Bonaparte, nous souffle je ne sais quoi dans le ventre.  
 
Et l'on marche la nuit, et l'on marche le jour, l'on te les tape à Montenotte, on court les rosser à Rivoli, Lodi, Arcole, Millesimo, et on ne te les lâche pas.  
 
Le soldat prend goût à être vainqueur. Alors Napoléon vous enveloppe ces généraux allemands qui ne savaient où se fourrer pour être à leur aise, les pelote très bien, leur chipe quelquefois des dix mille hommes d'un seul coup en vous les entourant de quinze cents Français qu'il faisait foisonner à sa manière. Enfin, leur prend leurs canons, vivres, argent, munitions, tout ce qu'ils avaient de bon à prendre, vous les jette à l'eau, les bat sur les montagnes, les mord dans l'air, les dévore sur terre, les fouaille partout. Après la campagne, nous voilà maîtres d'Italie, comme Napoléon l'avait prédit.  
 
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Dans ' Le Père Goriot ', Vautrin forçat évadé, est dénoncé et arrêté par les gendarmes. Démasqué, il n'hésite plus à parler l'argot et le langage des bagnards.
— Qui m'a trahi? C'est toi, vieille cagnotte, tu m'as donné un faux coup de sang, curieuse ! En disant deux mots, je pourrais te faire scier le cou dans huit jours. Je te pardonne, je suis chrétien. D'ailleurs ce n'est pas toi qui m'as vendu.  
 
Mais qui ? Je sais qui m'a vendu maintenant! Ce ne peut être que ce gredin de Fil-de-Soie. Pas vrai, père l'empoigneur ? Ça s'accorde trop bien avec le séjour de nos billets de banque là-haut. Plus rien, mes petits mouchards. Quant à Fil-de-Soie, il sera terré sous quinze jours, lors même que vous le feriez garder par toute votre gendarmerie. Que lui avez-vous donné, à cette Michonnette ? Quelques milliers d'écus ? Ha! Je valais mieux que ça!  
 
Ninon cariée, Pompadour en loques, Vénus du Père-Lachaise! Si tu m'avais prévenu, tu aurais eu six mille francs. Ha ! tu ne t'en doutais pas! vieille vendeuse de chair, sans quoi j'aurais eu la préférence!
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Dans ' Le Père Goriot ', la marquise de Beauséant, qui a un hôtel rue de Grenelle, vient d'apprendre que son amant la quitte. Elle donne à son cousin, Eugène de Rastignac, des conseils sur la façon de réussir.
— Eh bien ! monsieur de Rastignac, traitez ce monde comme il mérite de l'être. Vous voulez parvenir, je vous aiderai. Vous sonderez combien est profonde la corruption féminine, vous toiserez la largeur de la misérable vanité des hommes. Quoique j'aie bien lu dans ce livre du monde, il y avait des pages qui cependant m'étaient inconnues.  
 
Maintenant je sais tout. Plus froidement vous calculerez, plus avant vous irez. Frappez sans pitié, vous serez craint. N'acceptez les hommes et les femmes que comme les chevaux de poste que vous laisserez crever à chaque relais, vous arriverez ainsi au faite de vos désirs.  
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