phonétique

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1. Des mots latins aux mots français  
 
Il demeure toujours déroutant de constater que des mots latins tels que simulāre , armatūram ou scalam , prononcés respectivement [si.mu.'la:.re] (si-mou-LA-ré), [ar.ma.'tu:.ram] (ar-ma-TOU-ramm) et ['ska.lam] (SCA-lamm), aient pu, aux termes d'un peu moins de deux mille ans d'histoire, se transformer pour devenir respectivement sembler , armure et échelle .  
 
Nota bene. Dans une transcription phonétique, on sépare les syllabes au moyen d'un point; dans la transcription orthographique, on utilise le tiret.  
Dans une transcription phonétique, on appose une apostrophe (') devant la syllabe qui est accentuée; dans la transcription orthographique, on utilise les caractères majuscules.  
 
Tout aussi déroutante est l'observation que ces transformations présentent une certaine régularité si l'on regroupe des mots présentant des éléments de ' constructions ' phonologiques similaires.  
 
Les verbes latins simulāre , saltāre , (sal-TA-ré) , pescāre , (pés-KA-ré) et computāre (komm-pou-TA-ré) ont tous abouti à des verbes du premier groupe comportant la finale de l'infinitif en –er: sembler , sauter , pêcher , compter. Ce que l'historien de la langue est amené à conclure, c'est que la finale –āre des verbes latins du premier groupe a toujours abouti, en français, à –er.  
 
En définitive, existerait-il des règles à l'origine de cette régularité?  
 
De même, les noms latins armatūram [ar.ma.'tu:.ram], carrūcam [kar.'ru:.kam] (car-ROU-kam), cōsutūram [ko:.su.'tu:.ram] (co-ssou-TOU-ramm) et cūpam ['ku:.pam] (COU-pamm), ont tous dérivé en français en armure [aʁ.'myʁ], charrue [ʃɑ.'ʁy], couture [ku.'tyʁ], cuve [kyv]. Là encore, le philologue serait tenté d'en déduire la régularité suivante : en français, la voyelle longue latine ū [u:] (ou) est devenue [y] (u).  
 
L'hypothèse que les changements phonétiques seraient gouvernés par des règles objectivables est-elle vérifiable?  
 
On remarque par exemple que les noms et verbes latins scalam , scrībere (SCRI-bé-ré), spīnam (SPI-namm), spatham (SPA-tamm), stēllam (STÉL-lamm), sternūtāre (stér-nou-TA-ré), tous constitués d'un groupe de consonnes initiales débutant par la consonne s , à savoir [sk] (sc-), [sp] (sp-) et [st] (st-), sont devenus, selon les époques: eschiele , plus tard échelle ; escrire , plus tard écrire ; espine , plus tard épine ; espée , plus tard épée ; estoile , plus tard étoile ; esternuer , plus tard éternuer .  
 
Le philologue peut alors mettre en lumière la régularité par une règle simple: la syllabe initiale des mots ayant eu, en latin, les groupes de consonnes [sk] (sc-), [sp] et [st] (st-), est devenue d'abord [es] (és-), ensuite [e] (é-).  
 
Autre exemple éloquent soutenant l'idée que ces changements ne se sont pas faits au hasard: durant le passage du latin au français, la consonne [t] entre voyelles s'est affaiblie et a disparu dans tous les mots présentant ce contexte linguistique: vītam ['wi:.tam] (WI-tamm) › vie [vi]; matūrum [ma.'tu:.rum] (ma-TOU-roum) › mûr [myʁ]; mūtāre [mu:.'ta:.re] (mou-TA-ré) › muer [my.'ɥe]; sternūtāre [ster.nu:.'ta:.re] › éternuer [e.tεʁ.ny.'ɥe].  
 
Les historiens de la langue française ont réussi le tour de force de reconstruire les règles de passage du latin familier à la plupart des mots français, autrement dit, d'une part reconstruire ce qu'a pu être l'étymon latin véritable de tel ou tel mot français et d'autre part décrire les règles des différents changements, ordonnés selon les époques où ils se sont produits.  
 
Pour les besoins du site, nous n'exposerons qu'un ensemble limité de règles, uniquement celles qui sont utiles au lecteur pour apprécier les transformations que nous vous faisons voir et entendre.  
 
Ces règles, présentées dans l'ordre dans lequel elles ont pu être produites les unes par rapport aux autres (v. numérotation), sont énumérées dans la partie intitulée Transformations phonétiques. Le lecteur peut aussi s'y référer immédiatement en cliquant sur la description de la règle, située au-dessus des caractères phonétiques en rouge.  
 
Toutefois, le lecteur doit bien comprendre que ces règles ont été simplifiées en vue de les rendre les plus accessibles possible et pour dresser une chronique des évènements linguistiques qui se sont déroulés entre la forme latine et sa forme en français actuel.  
 
Il doit donc envisager ces règles en gardant à l'esprit qu'elles ne sont qu'une représentation, à grands traits, des changements sur l'axe du temps.  
 
Le lecteur peut, cependant, trouver des présentations complètes et nuancées des changements linguistiques en se référant aux ouvrages de la bibliographie détaillée, entre autres ceux de Bourciez et Bourciez (1967), Fouché (1959), Morin (1986), Zink (1991) et Englebert (2015).  
 
Le lecteur doit savoir aussi que la datation de certains changements linguistiques fait encore débat au sein de la communauté scientifique. Autrement dit, si les changements sont connus, leurs causes ne le sont pas toujours; les interactions entre ces changements, non plus; la chronique des évènements entre la forme latine et la forme en français moderne, pas toujours.  
 
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