Quels sont le statut et le rôle des règlements généraux?

Cette fiche explique le statut juridique ainsi que le rôle et la portée des règlements généraux dans le fonctionnement des organismes sans but lucratif (OSBL).

Essentiellement, les règlements généraux sont une prolongation de la Loi. Le Code civil du Québec (art. 310) stipule que « Le fonctionnement, l’administration du patrimoine et l’activité des personnes morales sont réglés par la loi, l’acte constitutif (la charte) et les règlements ».

On peut dire que les règlements généraux créent des obligations légales pour la corporation et ses membres.

Ils définissent comment la corporation entend appliquer la Loi dans la définition des membres, la structure de responsabilité et de pouvoir, la gestion des finances et le fonctionnement démocratique. En termes modernes, on peut dire que les règlements généraux définissent la gouvernance des organisations.

Le lecteur consultera aussi la fiche Quel est le contenu des règlements généraux?

 

 

Nature légale des règlements généraux

À la différence de la résolution, qui a un effet sur un seul acte (ex. : embaucher quelqu’un ou acheter du matériel), le règlement (en anglais « by-law ») est un « statut privé », un édit formel de la corporation[1] qui régit la gouvernance de la corporation. Les règlements généraux sont en quelque sorte une application locale de la Loi sur les compagnies.

Les règlements généraux sont adoptés par le conseil d’administration (CA) et entrent en vigueur immédiatement. Ils doivent toutefois être soumis à l’assemblée générale (spéciale ou annuelle) qui doit les approuver. Si l’assemblée ne les approuve pas, les règlements cessent d’être en vigueur.

Art. 91.3 de la Loi sur les compagnies : Les administrateurs peuvent révoquer, modifier ou remettre en vigueur ces règlements; mais chaque règlement (excepté ceux relatifs aux matières énoncées dans le sous-paragraphe du paragraphe 2 du présent article), et chaque révocation, modification ou remise en vigueur d'un règlement, à moins qu'ils ne soient ratifiés dans l'intervalle par une assemblée générale de la compagnie dûment convoquée à cette fin, ne sont en vigueur que jusqu'à la prochaine assemblée annuelle de la compagnie; et s'ils ne sont pas ratifiés à cette assemblée, ils cessent, mais de ce jour seulement, d'être en vigueur.

Martel indique que les règlements généraux « doivent être raisonnables compte tenu des besoins et intérêts de la corporation, et respectueux de la liberté personnelle des membres et de leur droit à l’égalité[2]. »

Les règlements généraux : obligation différente selon les lois québécoise et canadienne

La Loi sur les compagnies du Québec ne fait pas mention clairement de l’obligation de se doter de règlements généraux alors que la Loi canadienne en fait une obligation et va même jusqu’à demander que ces règlements soient soumis à l’approbation du ministre.

Même s’il n’y a pas obligation, Martel rappelle que « l’absence de réglementer tous les incidents inhérents à sa régie ainsi que l’absence de règlements exposerait la corporation et ses membres à l’incertitude et à l’arbitraire[3]. »

Imaginons que les décisions du comité exécutif sont contestées par le CA, qu’un membre refuse se conformer à une décision parce qu’il en conteste la validité, qu’un client annule sa livraison parce qu’il affirme que le président ne pouvait passer la commande. Dans tous ces cas, les règlements généraux peuvent servir d’arbitre et de référence.

 

Sur quoi peuvent porter les règlements généraux?

L’article 91 de la Loi sur les compagnies (Québec) stipule que les administrateurs peuvent édicter des règlements pour régler les objets suivants :

a) le nombre des administrateurs, la durée de leur charge (…) et leur rétribution, s'ils doivent en recevoir une;

b) la nomination, les fonctions, les devoirs et la destitution de tous dirigeants, agents et employés de la compagnie, le cautionnement à fournir par eux à la compagnie et leur rémunération;

c) l'époque et le lieu des assemblées annuelles de la compagnie, la convocation des assemblées régulières et extraordinaires du conseil d'administration et de la compagnie, le quorum, les conditions exigées des fondés de pouvoir non autrement déterminées par la présente partie et la manière de procéder à ces assemblées;

d) l'imposition et le recouvrement des pénalités et des confiscations susceptibles d'être déterminées par règlement;

e) la conduite des affaires de la compagnie sous tous autres rapports.

Martel précise que « les administrateurs adoptent des règlements traitant de façon générale de ces matières, stipulant qu’ils pourront agir par simple résolution dans les cas d’espèces[4]. »

S’ajoutent des règlements concernant les catégories de membres, ainsi que les conditions d’admission, de suspension ou d’expulsion, qui se fondent au Québec sur l’article 310 du Code civil.

 

Le pouvoir de coercition des règlements généraux et le recours à la justice

Les règlements généraux lient tous les membres de la corporation, à compter de leur entrée en vigueur, mais ne peuvent avoir d’effets rétroactifs. Dans le cas de tiers (usagers, clients, fournisseurs, municipalité, etc.), ils ne sont tenus de respecter ces règlements que s’ils en ont pris connaissance; ils ne peuvent pas être réputés au fait des règlements.

« …les règlements constituent en fait un contrat entre la corporation et ses membres. » (Art. 313 du Code civil du Québec)

De ce fait, on peut avoir recours à la justice si ce contrat n’est pas respecté.

« Le membre qui se conforme aux règlements généraux peut être considéré les avoir confirmés et ne plus pouvoir en contester la validité. Enfin, un règlement dont la corporation permet l’inobservation générale et continue est de ce fait considéré comme tacitement abrogé et sans effet[5]. »


[1] Martel, Paul (2011), La corporation sans but lucratif au Québec, aspects théoriques et pratiques, Éditions Wilson & Lafleur et Martel, Montréal, p. 13-1.

[2] Idem, 13-4.1

[3] Idem, 13-4.1

[4] Idem, 13-3

[5] Idem, 13-6

 

En résumé

  • En termes simples, on peut dire que les règlements généraux sont les termes d’un contrat entre les membres et la corporation qui en définit le fonctionnement. Ce contrat est assujetti au Code civil du Québec et sa définition régie par la Loi sur les compagnies du Québec.
  • Les administrateurs réunis en CA sont les seules personnes à pouvoir les écrire et les adopter pour qu’ils soient en vigueur. L’assemblée des membres a seulement le pouvoir de les entériner ou de les refuser, ce qui est par ailleurs important.
  • Il y a donc un cadre légal qui contrôle les règlements généraux et leur donne le pouvoir d’orienter et de garantir le fonctionnement d’une organisation.
  • Le rôle premier de ces règlements est de définir les balises des comportements, d’arbitrer les conflits et, à la limite, de permettre à la justice de statuer sur la légalité d’une décision ou d’un comportement.

Les règlements généraux sont donc des outils puissants pour gérer une organisation. Et comme tout outil de la sorte, il faut les utiliser avec précaution.  Mais ils sont essentiels.

 

Thème : ORGANISATIONS: Savoir gérer un organisme
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