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Docteur, je mets du froid ou du chaud ?

Voilà une question à laquelle les professionnels de la santé, dont les chiropraticiens, doivent quotidiennement répondre. Certains prôneront le froid en tout temps. D’autres suggéreront le froid en présence d’une douleur aiguë et le chaud après la période inflammatoire pour relâcher les muscles. Mais, que disent les données probantes à ce sujet ?

En 2015, une revue de la littérature a été publiée afin d’informer les professionnels de la santé sur l’utilisation du froid et du chaud (Malanga et al. 2015). Ces informations, basées sur les effets physiologiques théoriques et les données probantes supportent l’utilisation clinique de ces thérapies.

La thérapie par le froid ou cryothérapie

La cryothérapie est l’application d’une substance ou d’un médium physique afin de diminuer la température de la peau et des tissus sous-jacents. Le froid humide est plus efficace que des cubes de glace ou la glace concassée pour diminuer la température de la peau et des muscles.

Les vaporisateurs contenant du menthol n’entraînent pas une diminution de la température de la peau, mais entraînent une sensation de froid et un effet analgésique par la stimulation de récepteurs sensibles au froid.

Effets physiologiques théoriques:

  • Diminution de la circulation sanguine par une vasoconstriction;
  • Diminution de la demande métabolique des tissus réduisant les dommages hypoxiques;
  • Diminution de l’inflammation;
  • Diminution de l’œdème;
  • Diminution d’un spasme musculaire;
  • Diminution de l’élasticité des tissus conjonctifs;
  • Anesthésie locale cutanée.

Données probantes sur les effets cliniques :

  • Il y a peu de données sur les bienfaits lors d’une blessure aiguë. Les études disponibles sont de faible qualité;
  • Une revue Cochrane suggère une diminution de la douleur associée à une courbature lorsqu’une immersion dans l’eau froide est effectuée après l’exercice comparativement au repos ou à aucune recommandation/intervention. Cet effet bénéfique a été observé dans les 24 à 96 heures suivant l’exercice physique. Toutefois, les données demeurent contradictoires concernant la sensation de courbature, la fonction, la force et les amplitudes de mouvement.

 

La thérapie par le chaud

La thérapie par le chaud consiste à appliquer un médium chaud sur une partie du corps afin d’augmenter la température des tissus. La chaleur peut être superficielle (bouteille d’eau chaude, coussin chaud électrique ou non, enveloppement chaud, pierres chaudes, bain chaud, paraffine, vapeur, lumière chaude, etc.) ou profonde (diathermie, ultrasons, micro-ondes, etc.).

Effets physiologiques théoriques:

  • Diminution de la douleur;
  • Augmentation de la circulation sanguine afin de favoriser la guérison par une augmentation de l’apport en nutriments et en oxygènes dans les tissus lésés;
  • Augmentation de la demande métabolique;
  • Augmentation de l’élasticité des tissus conjonctifs ce qui se traduirait en une augmentation de l’amplitude de mouvement.

Données probantes sur les effets cliniques:

  • Dans le cas d’une douleur aiguë (plus spécifiquement la lombalgie), la chaleur est associée à une plus grande diminution de la douleur, de la sensation de raideur, du stress ainsi qu’à une plus grande augmentation de la fonction incluant la flexibilité comparativement à la prise d’un placebo oral. La chaleur peut être appliquée jusqu’à un total de 8 heures par jour pour 5 jours consécutifs dans certaines des études incluses;
  • Pour ce qui est des courbatures, l’application de chaleur sur une période de 4 heures avant l’exercice et 4 heures suivant l’exercice a pour résultat une intensité de la douleur et une incapacité moindre (24 heures post-exercice) que des étirements effectués immédiatement après l’exercice.

Alors le froid ou le chaud ?

Quelques études ont comparé la thérapie par le chaud et par le froid :

  • L’application de chaleur à 18 et 32 heures après l’exercice (période de 8 heures à chacune des fois) résulte en une douleur moindre (138% moindre) que l’application de froid (15-20 minutes, toutes les 4 heures de 18 à 42 heures après l’exercice). Toutefois, aucune différence entre le froid et le chaud n’est observée pour l’incapacité associée aux courbatures;
  • L’immersion dans l’eau chaude durant 30 minutes après un exercice physique entraîne une diminution des marqueurs musculaires de réaction à un stress. L’immersion dans l’eau froide entraîne, quant à elle, une augmentation de ces marqueurs;
  • Dans le cas d’une douleur aiguë (personnes avec une lombalgie aiguë se présentant à l’urgence), l’application de 30 minutes de froid ou de chaud ne semble pas diminuer la douleur.

 

Conclusion

Les données probantes actuelles sont contradictoires, mais certaines recommandations peuvent être émises. Ainsi, le froid, par son action anti-inflammatoire et réductrice de l’œdème, semble à privilégier dans le cas d’une blessure aiguë. Toutefois, le froid devrait se limiter à une période de 48 à 72 heures post-blessure. La chaleur est, quant à elle, la thérapie de choix pour la lombalgie aiguë et les courbatures musculaires. Dans tous les cas, la thérapie devrait être adaptée au patient et considérer ses préférences, sa condition et ses comorbidités.

 

Référence

Malanga, G. A., Yan, N. & Stark, J. (2015). Mechanisms and efficacy of heat and cold therapies for musculoskeletal injury. Postgrad Med, 127(1), 57-65. Logo_PubMed2

Dre Isabelle Pagé chiropraticienne, DC, MSc, PhD(c)