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Soins chiropratiques et risque d'une hernie discale, mais de quel type de risque s’agit-il ?

La manipulation et la mobilisation vertébrale font aujourd’hui part entière des recommandations concernant la prise en charge des lombalgies.[1, 2] Les soins chiropratiques semblent également un traitement potentiel pour certains cas de hernies discales.[3] Comme tout traitement médical ou paramédical, les soins chiropratiques présentent certains risques tels que la possibilité d’induire une blessure discale. Certaines études de cas et de séries de cas présentant des hernies discales post traitement chiropratique ont été publiées ce qui supporte la théorie que cela constitue un risque associé aux soins chiropratiques lors d’une lombalgie.[4, 5] Mais, est-ce possible que la blessure discale ne soit pas le résultat des soins prodigués ? C’est en effet ce que suggère une étude publiée récemment.

La hernie discale symptomatique présente habituellement des symptômes et des signes suggérant une compression ou une irritation d’une racine nerveuse. Ces symptômes/signes inclus une douleur irradiante de type radiculaire au niveau des membres inférieurs, des résultats positifs aux tests de mise en tension des racines nerveuses, des déficits neurologiques (faiblesse musculaire et modification des réflexes ostéotendineux) et un résultat d’imagerie (IRM ou tomodensitométrie) collaborant les trouvailles cliniques (Figure 1).[6] Toutefois, plusieurs patients auront une présentation clinique beaucoup moins claire dans la phase précédant l’arrivée des symptômes radiculaires (phase dite de prodrome).[7] Il est ainsi possible que, lors du prodrome, les patients consultent en chiropratique ou en médecine pour leur lombalgie aiguë et reçoivent un diagnostic de lombalgie de type mécanique (ou non spécifique). Dans les heures/jours suivants, les symptômes radiculaires apparaissent et le diagnostic tombe : hernie discale lombaire.

Douleur radiculaire

Figure 1. Signes et symptômes d’une atteinte radiculaire. [6]

 

Hincapié et al. (2017) ont tenté de mieux comprendre l’association entre une consultation en chiropratique pour un motif de douleurs lombaires et le risque de hernie discale menant à une chirurgie.[8] Pour ce faire, ils ont consulté les registres des patients ayant subi une chirurgie entre 1999 et 2004 pour une hernie discale lombaire aiguë soit un total de 195 cas en Ontario. De ce nombre, 72 (37%) patients ont consulté un chiropraticien dans la dernière année alors que 186 (95%) patients ont consulté un médecin généraliste. Lorsque l’on ne s’intéresse qu’aux patients ayant consultés en chiropratique ou en médecine générale dans les 14 jours précédant le diagnostic de hernie discale émis à l’urgence, les pourcentages diminuent respectivement à 22 et 59%. En considérant la probabilité plus importante de consulter en médecine qu’en chiropratique pour une même période, le risque de souffrir d’une hernie discale lombaire aiguë suite à une consultation en médecine générale est d’environ 14,5 % alors qu’il est estimé à 12,9 % suite à une consultation en chiropratique !

Cette étude propose ainsi la présence d’une relation de type temporel entre une hernie discale lombaire aiguë (nécessitant une chirurgie) et une consultation en chiropratique. En d’autres mots, certains patients se présentant avec une lombalgie avec absence de signes/symptômes radiculaires peuvent en fait se situer dans une période prodromale. À ce moment, ce ne sont ni les soins reçus en chiropratique, ni même les soins reçus au niveau médical, qui éviteront l’apparition des signes et symptômes radiculaires dans les jours suivants.

Attention ! Cette étude ne permet pas d’exclure la possibilité qu’un traitement chiropratique, et ce à même titre qu’un simple examen physique, puisse causer ou aggraver une blessure discale. L’importance de ce risque est malheureusement actuellement inconnue.


Références

  1. Wong, J.J., et al., Clinical practice guidelines for the noninvasive management of low back pain: A systematic review by the Ontario Protocol for Traffic Injury Management (OPTIMa) Collaboration. Eur J Pain, 2017. 21(2): p. 201-216. Logo_PubMed2
  2. Qaseem, A., et al., Noninvasive treatments for acute, subacute, and chronic low back pain: A clinical practice guideline from the american college of physicians. Annals of Internal Medicine, 2017. 166(7): p. 514-530. Logo_PubMed2
  3. Leemann, S., et al., Outcomes of acute and chronic patients with magnetic resonance imaging-confirmed symptomatic lumbar disc herniations receiving high-velocity, low-amplitude, spinal manipulative therapy: a prospective observational cohort study with one-year follow-up. J Manipulative Physiol Ther, 2014. 37(3): p. 155-63. Logo_PubMed2
  4. Boucher, P. and S. Robidoux, Lumbar disc herniation and cauda equina syndrome following spinal manipulative therapy: a review of six court decisions in Canada. J Forensic Leg Med, 2014. 22: p. 159-69. Logo_PubMed2
  5. Hincapie, C.A., et al., Chiropractic spinal manipulation and the risk for acute lumbar disc herniation: a belief elicitation study. Eur Spine J, 2017. Logo_PubMed2
  6. Deyo, R.A. and S.K. Mirza, Herniated Lumbar Intervertebral Disk. New England Journal of Medicine, 2016. 374(18): p. 1763-1772. Logo_PubMed2
  7. Weber, H., The natural history of disc herniation and the influence of intervention. Spine (Phila Pa 1976), 1994. 19(19): p. 2234-8; discussion 2233. Logo_PubMed2
  8. Hincapie, C.A., et al., Chiropractic care and risk for acute lumbar disc herniation: a population-based self-controlled case series study. Eur Spine J, 2017. Logo_PubMed2