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Égalité homme femme, est-ce le cas de la douleur chronique ?

Une question de sexe ou de genre ?

L’étude de Rovner et al. (2017) compare les douleurs chroniques entre les hommes et les femmes. Toutefois depuis quelques années, un effort soutenu a été porté au fait de considérer les genres qui, au contraire de la ségrégation homme-femme qui réfèrent aux caractéristiques biologiques, faire référence à la représentation sociale, culturelle et symbolique de la féminité et de la masculinité.(7) Le concept de genre a été introduit afin d’évaluer le rôle des facteurs biologiques dans les différences sociales entre les hommes et les femmes. Grâce aux analyses de genres, il est ainsi possible d’évaluer si une femme considérée très masculine socialement présente des caractéristiques similaires à une femme très féminine.

Implications cliniques

Les hommes et les femmes diffèrent en ce qui a trait au profil de leur douleur musculosquelettique chronique, de leurs réactions à celle-ci et de leurs comportements en présence de celle-ci. Cette disparité entre les sexes présente de potentielles implications au niveau de la prise en charge des patients présentant des douleurs musculosquelettiques chroniques.

Les hommes et les femmes présentent plusieurs différences au niveau des douleurs musculosquelettiques de type chronique. Premièrement, ce type de douleurs présente une prévalence plus élevée chez la femme que chez l’homme. En fait, on estime que deux hommes pour trois femmes souffrent de céphalées, cervicalgies, douleurs aux épaules, aux genoux ou au dos. Ce ratio s’élève à deux hommes pour cinq femmes dans le cas des migraines et dans le cas plus particulier de la fibromyalgie, c’est cinq femmes qui sont touchées pour un homme. (1)

La réponse aux traitements semble également différente entre les hommes et les femmes et pourrait, tout du moins en partie, s’expliquer par la biologie humaine. En effet, le seuil de perception de la douleur est plus faible chez les femmes et celles-ci rapportent des intensités de douleurs souvent plus élevées que l’homme.(2-3) Enfin, les femmes rapporteraient surtout des douleurs diffuses ou touchant plusieurs régions du corps, alors que les hommes présenteraient des douleurs localisées à une région particulière du corps.(4) Les études cliniques ont également permis de constater que les femmes utilisent davantage d’analgésiques et sont plus sensibles au dosage et au type de médication.(5) Malgré ses différences, peu d’informations concernant les facteurs psychologiques pouvant être potentiellement importants dans le cadre d’une prise en charge clinique de patients atteints de douleurs musculosquelettiques chroniques ne sont connues.

Considérant l’impact potentiel d’une connaissance plus approfondie des différences entre les sexes au niveau des mesures psychologiques, une équipe de recherche de la Suisse s’est penchée sur la question.(6) Pour ce faire, 1371 patients, référés à un centre de réadaptation et de la douleur à Linköping pour une douleur musculosquelettique chronique et d’origine non maligne, ont rempli une série de questionnaires. Avant leur premier rendez-vous, ces patients recevaient un courriel les invitant à compléter une série de questionnaires évaluant les caractéristiques de leur douleur, la présence de symptômes liés à l’anxiété et à la dépression, leur qualité de vie et leur satisfaction face à celle-ci, leurs croyances et comportements face à leur condition, la présence de kinésiophobie (peur liée au mouvement et à l’activité physique) ainsi que l’impact de leur douleur sur leurs activités et leur vie en général.

Les résultats de cette étude confirment certaines différences déjà connues entre les hommes et les femmes. Premièrement, davantage d’hommes que de femmes consultent pour des douleurs chroniques (68,4% des répondants étaient des femmes) et les femmes présentent davantage des douleurs diffuses (35% des répondantes) alors que les hommes rapportaient des douleurs ciblant une région précise (78% des répondants). Concernant les divers aspects évalués par les questionnaires, plusieurs différences significatives ont pu être notées. Ainsi, pour un même niveau de douleur (intensité et inconfort), les femmes rapportent un niveau d’activité plus élevé que les hommes, en plus d’une plus grande acceptation de leur douleur, une plus faible peur envers celle-ci ainsi qu’un support social plus important et plus satisfaisant. De leur côté, les hommes présentent un niveau plus élevé de kinésiophobie ainsi que de troubles de l’humeur.

Références
1.  L. Leresche, Defining gender disparities in pain management. Clin Orthop Relat Res 469 (2011) 1871-7. Logo_PubMed2
2. A. Dawson, and T. List, Comparison of pain thresholds and pain tolerance levels between Middle Easterners and Swedes and between genders. J Oral Rehabil 36 (2009) 271-8. Logo_PubMed2
3. A. Popescu, L. LeResche, E.L. Truelove, and M.T. Drangsholt, Gender differences in pain modulation by diffuse noxious inhibitory controls: a systematic review. Pain 150 (2010) 309-18. Logo_PubMed2
4. A.M. Unruh, Gender variations in clinical pain experience. Pain 65 (1996) 123-67. Logo_PubMed2
5. R.B. Fillingim, C.D. King, M.C. Ribeiro-Dasilva, B. Rahim-Williams, and J.L. Riley, III, Sex, Gender, and Pain: A Review of Recent Clinical and Experimental Findings. The Journal of Pain 10 447-485. Logo_PubMed2
6. G.S. Rovner, K.S. Sunnerhagen, A. Bjorkdahl, B. Gerdle, B. Borsbo, F. Johansson, and D. Gillanders, Chronic pain and sex-differences; women accept and move, while men feel blue. PLoS One 12 (2017) e0175737. Logo_PubMed2
7. P. Verdonk, and I. Klinge, Mainstreaming Sex and Gender Analysis in Public Health Genomics. Gender Medicine 9 (2012) 402-410. Logo_PubMed2

Dre Isabelle Pagé chiropraticienne DC, MSc, PhD(c)