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Histoire de l'iconographie botanique
en Amérique française du 17e au 19e siècle
CHARLEVOIX

9. La Sarracénie pourpre ou une illustration de l'apport de Sarrazin à la botanique de Charlevoix et de Tournefort (suite 1.)

Charlevoix joint à la figure de la Sarrasine Illustration ou de la Sarracénie pourpre (Linné) cette excellente description:

"Cette Plante est d'un port fort extraordinaire, sa racine est épaisse d'un demi pouce, garnie de fibres, du collet de laquelle naissent plusieurs feuilles, qui en s'éloignant, forment une espèce de fraise; ces feuilles font en cornets longs de 5 à 6 pouces fort étroits dans leur origine, mais qui peu à peu s'évasent assez considérablenent. Ces cornets, qui commencent par ramper sur la terre, s'élèvent peu à peu, & forment dans leur longueur un demi rond, dont le convexe est dessous, & le cave dessus; ils sont fermés dans le fond & souvent en gueule par le haut. La lèvre supérieure, quoique dessous, (car ces feuilles sont comme renversées) est longue de plus d'un pouce, large de deux, arrondie dans sa circonférence, elle a une oreillette proche & à côté de l'ouverture; cette lèvre, qui est intérieurement velue & creusée en cuillère, est tellement disposée, qu'elle semble ne l'être ainsi, que pour mieux recevoir l'eau de la pluye, que le cornet garde exactement. La lèvre inférieure, si l'on peut dire que c'en soit une, est fort courte, ou plutôt le cornet est comme coupé, & simplement roulé dans cet endroit de dedans en dehors, d'une manière très-propre pour affermir cette ouverture. Il rampe sur la partie cave du cornet une feuille, qui n'en est qu'un prolongement; elle est étroite dans ses extrémités, plus large & arrondie dans son milieu, ressemblant assez bien à la barbe d'une Poulle d'Inde. Du milieu de ces cornets il s'élève une tige longue d'environ une coudée; elle a la grosseur d'une plume d'Oye & elle est creuse: elle porte à son extrémité une fleur à six pétales de deux façons, dont il y en a cinq disposés en rond soûtenus sur un calice de trois feuilles: du milieu de cette fleur, qui ne tombe point, que le fruit ne soit mûr, s'élève le pistil, qui devient le fruit, lequel est relevé de cinq côtes, & divisé en cinq loges, qui contiennent des semences oblongues, rayées & appuyées sur un placenta, qui l'est lui-même sur une continuation de la tige, qui en se prolongeant, sort du fruit de la longueur d'environ deux lignes. C'est sur cette extrémité, qu'est située la sixième feuille, laquelle est beaucoup plus mince, que celles, qui composent la rose, qui sont dures, épaisses & oblongues, tirant sur le rouge: quand le fruit est mûr: cette sixième feuille forme un chapiteau de figure pentagone. Toute la partie convexe regarde le dehors, & la concave, le fruit; chaque angle est incisé de la profondeur d'environ deux lignes. Elle croît dans les Pays tremblans, sa racine est vivace & âcre."*.

C'est une copie exacte du texte* qui accompagnait l'envoi no. 1 de 1698 de spécimens botaniques de Michel Sarrazin à Vaillant.


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