Comment soutenir la (co)régulation des comportements en classe flexible?

Plusieurs auteurs mettent en évidence que la motivation à venir en classe, à y apprendre et à y adopter des comportements prosociaux est une priorité en classe flexible (Delhomme, 2018; Tiennot, 2018). Dans ce contexte, les personnes apprenantes développent la régulation comportementale (Laquerre, 2018; Pantuosco-Hensch, 2020; Wild et al., 2018), considérant qu’elles disposent notamment d’une grande latitude quant au :

  • choix de la zone de travail;
  • choix de l'assise;
  • choix des coéquipiers et coéquipières;
  • choix des contenus, des procédures, des processus et des productions.

Selon Leroux et al. (2021), des enseignantes du primaire affirment gérer moins de comportements perturbateurs en classe flexible. Les auteurs soulignent, en s’appuyant sur les écrits d’Archambault et Chouinard (2016), que la classe flexible vient répondre à différents besoins, ce qui peut diminuer des manifestations comportementales associées à l’évitement, par exemple. Deux besoins des personnes apprenantes ressortent fréquemment de la littérature liée à la classe flexible (Parent et al., soumis) :

  • rester attentives et engagées;
  • bouger.

Les personnes enseignantes sont préoccupées par des manifestations de fatigue cognitive, d’inattention et/ou d’hyperactivité (Basye et al., 2015; Laquerre, 2018). La classe flexible permet le mouvement qui, lui, peut jouer sur l’augmentation de la motivation, de l’engagement et de la capacité attentionnelle (Gochenour et al., 2017; Kwok et al., 2019; Pantuosco-Hensch, 2020; Schoolcraft, 2018; Tiennot, 2018; Walsh, 2019). À l’inverse, pour certaines personnes apprenantes, le mouvement peut être une source de stress, d’inconfort et de bris de concentration (Parent et al., soumis). Il leur revient alors de changer de place ou de coéquipiers et coéquipières.

L’apprenant·e de la classe flexible est appelé·e à développer son autonomie, son sens des responsabilités et la prise décisionnelle. Or, certaines personnes peuvent éprouver des difficultés comportementales principalement associées à :

  • une utilisation inadéquate de l’espace et du matériel;
    • par exemple, en raison de sa posture, un apprenant tombe d’une assise dynamique (fréquent au primaire);
  • Une gestion inefficace du temps;
    • par exemple, des personnes apprenantes perdent du temps en raison de nombreuses transitions (Havig, 2017);
  • un dysfonctionnement au sein d’une équipe de travail;
    • par exemple, des personnes apprenantes sont tentées de s’assoir à côté de leurs amies et bavardent. Or, le choix des places doit soutenir l’apprentissage et il peut arriver que les équipes ne soient pas forcément formées en fonction des affinités (Adderley et al., 2015; Magen-Nagar, 2017);
  • un désengagement face à la tâche;
    • par exemple, une apprenante n’est pas intéressée par son rôle au sein d’une équipe et reste en retrait;
  • une perte de concentration;
    • par exemple, un apprenant est déconcentré par le niveau sonore et par une autre personne apprenante qui rebondit de manière exagérée sur une chaise-ballon.

Des auteurs pointent la difficulté de certaines personnes apprenantes à faire un choix éclairé de place (Basye et al., 2015; Delhomme, 2018). En cohérence avec les principes de la classe flexible, la personne enseignante amène progressivement la personne apprenante à verbaliser ses besoins pour guider son choix de place et son utilisation du matériel.

C’est principalement le balayage visuel de la classe et la circulation constante dans les différentes zones qui permettent à l’enseignant·e d’offrir une aide visant le soutien à l’engagement actif des personnes apprenantes (Delhomme, 2018) et le soutien à la prise de décision relative au choix de place.

Par ailleurs, Gaudreau (2017) aborde une stratégie préventive de gestion des comportements pouvant se lier étroitement au contexte de la classe flexible, soit :

  • limiter de manière temporaire l’espace et le matériel.

Par cette stratégie, la personne enseignante de la classe flexible sollicite la capacité des personnes apprenantes à réfléchir de manière critique à l’espace et au matériel. Avec guidance, ce sont elles qui ont à envisager des alternatives, à anticiper les conséquences de leurs choix, à prévenir des effets indésirables (Parent et al., soumis).

Il est également possible d’adapter l’espace et le matériel (Coulombe-Morency, 2019; Vallée 2019), soit :

  • offrir un mobilier traditionnel (bureau ou pupitre personnel avec chaise) au sein de la classe flexible de type hybride.

L’hybridité (mobilier traditionnel et mobilier flexible se côtoient) peut nourrir une ouverture à la diversité (Parent et al., soumis).

Il revient à la personne enseignante de guider les personnes apprenantes pour choisir des places, des assises, des coéquipiers ou coéquipières et des objectifs d’apprentissage. Ce serait l’âge des personnes apprenantes et leur expérience en classe flexible qui détermineraient notamment le niveau d’aide à la décision requis (Parent et al., soumis). Le développement de la régulation comportementale passe par ce soutien offert des suites d’une prise de conscience des facteurs de risque et de protection relativement au climat d’apprentissage.

Chez la personne apprenante, une prise de conscience est tout aussi nécessaire, et ce, en fonction d’une connaissance des besoins individuels et collectifs, de même que des caractéristiques de l’activité proposée. Ses réflexions, par un regard sur soi et sur les autres, peuvent porter sur les points suivants :

  • quelle zone de travail convient le mieux?
  • quelle assise pourrais-je choisir?
  • avec quels coéquipiers pourrais-je travailler?
  • quels contenus pourrais-je choisir?
  • quelles productions pourrais-je choisir pour faire état de mes apprentissages?

Dans un coin conçu pour le dialogue, les personnes enseignantes peuvent accompagner, au besoin, la régulation ou la corégulation comportementale et émotionnelle, tout en préservant la dignité des personnes apprenantes (Delhomme, 2018).

Précision pour le primaire et le secondaire

Afin de stimuler leur autonomie, des personnes apprenantes peuvent être invitées à réguler leurs comportements inadéquats en :

  • se remémorant les règles de la classe flexible et les comportements attendus;
    • par exemple, une personne apprenante consulte l’affiche murale indiquant la façon d’utiliser le banc oscillant. La personne enseignante lui en modélise l’usage;
  • demandant de l'aide;
  • changeant de place, tout en justifiant la raison de ce changement et le besoin à combler (conséquence naturelle ou logique);
    • une équipe dysfonctionne;
    • une personne apprenante explique qu’il doit changer de place en raison d’un inconfort aux jambes à la table basse;
    • une personne enseignante demande un changement de place et propose à l’apprenante d’expliquer la raison qui le justifie (causes).

Pour citer cette page : Caron, J. (2022). (Co)régulation des comportements. Comment soutenir la (co)régulation des comportements en classe flexible? Dans G. Bergeron, L. Bergeron, J. Caron, A. Gareau, J. Lacerte, S. Lefebvre, S. Parent, M. Point et L. St‑Vincent (dir.), L’aménagement de classes flexibles. Document produit dans le cadre des Projets inédits du ministère de l’Éducation. Université du Québec à Trois‑Rivières.

Josianne Caron, UQAR