Science forensique

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La génétique forensique renvoie généralement à l'idée de preuve, au sens judiciaire du terme. On met souvent de l'avant le côté analytique, d'où l'expression anglaise DNA typing, utilisée généralement comme synonyme de forensic genetics. Dans cette perspective, les maîtres-mots utilisés pour la décrire sont "technique", "normes" et "assurance qualité". L'utilisation de la trace d'ADN comme preuve dans les affaires judiciaires, notamment lorsque le profil génétique mis au jour sur un scène de crime est identique à celui d'un suspect, représente bien sûr l'aspect le plus visible de la génétique appliquée à la criminalistique. Toutefois, la génétique forensique nous offre un objet d'étude et un champ d'application plus larges que ceux en rapport avec la scène de crime. Ainsi, il est possible de s'intéresser non seulement à des événements particuliers (par ex., un meurtre) mais également à des phénomènes (par ex., trafic illégal), et ce, tant dans une perspective judiciaire que d'investigation. On peut également étendre l'application de la génétique forensique à des domaines aussi divers que la recherche de personnes disparues (par ex., lors de désastres de masse), l'anthropologie (par ex., l'identification d'ossements anciens), l'écologie (par ex., le suivi du mouvement des animaux par les traces d'ADN qu'ils laissent) ou l'environnement (par ex., la microbiologie environnementale). Je définis plus largement la génétique forensique comme la branche de la science forensique qui utilise la variation génétique présente dans les populations pour effectuer des inférences sur un événement ou un phénomène particulier à partir de traces matérielles1.
 
Dans cette définition, l'intégration (et non la réduction) de la génétique comme composante de la science forensique (au singulier) l'inscrit dans la démarche de logique indiciaire de celle-ci qui, au premier chef, nous oblige à nous questionner sur la pertinence de la trace d'ADN : quelle information cette dernière nous fournit-elle sur les hypothèses mises en compétition pour expliquer un cas ou un phénomène particulier que l'on veut reconstituer ? De plus, cette définition a l'avantage d'introduire l'idée de population et donc celle de l'interprétation de la trace d'ADN, c'est-à-dire de sa mise en contexte pour en établir la signification (ou dans un contexte judiciaire, sa valeur probante). À cet égard, dans mes recherches je m'intéresse à l'adéquation des modèles statistiques utilisés pour calculer la valeur probante d'une trace d'ADN à la complexité des populations réelles. En effet, ces modèles, aussi complexes soient-ils (par ex., pour analyser les profils mélangés et partiels), se rapportent à des populations (très) idéalisées. Dans quelle mesure cette simplification est-elle justifiée, notamment au regard de son impact sur le décideur de fait (juge, jury) ou d'action (gestionnaire, enquêteur, politique) ? Je m'intéresse également aux importantes questions éthiques que soulève l'utilisation de l'ADN à des fins d'enquête, de profilage et de preuve judiciaire. Aux maîtres-mots de la génétique forensique cités plus haut, j'ajouterais donc "pertinence", "populations" et "éthique".

 1. Note: je préfère l'expression "génétique forensique" à "génétique judiciaire" ou "génétique criminalistique" pour mettre l'emphase sur la portée plus large de cette discipline qu'aux seuls domaines criminel ou judiciaire. Ce faisant, j'opte pour un emploi du mot "forensique" se rapportant à la trace matérielle. Cela s'éloigne de son acception originelle qui se rapportait plutôt à la médecine légale ("Médecine légale, Medicina forensis", dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert). Ce choix pourrait ne pas faire l'unanimité.
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