La colonisation de l'Abitibi

 

Résumé :

La crise de 1929 force des citadins à défricher une terre. Ils partent coloniser l'Abitibi-Témiscaminque.

Références :

Office national du film, Les Brûlés, Réalisation de Bernard Devlin, d'après le roman de Hervé BIRON, Nuages sur les Brûlés.

LINTEAU, DUROCHER, ROBERT et RICHARD, Histoire du Québeccontemporain, tome 2.

Auteur :

Pierre Girard

 

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Le 15 décembre 1937

Depuis 6 mois, j'habite une cabane en bois rond dans un coin perdu de l'Abitibi. Avant, j'habitais en ville, mais j'étais en
chômage depuis 1931. Le patron avait fermé l'usine car il n'avait plus d'argent pour nous payer. Les quelques dollars
donnés par le gouvernement ne suffisaient pas à nous faire vivre, ma famille et moi.

La vie était devenue très difficile depuis 6 ans. On ne voyait pas de changements pour l'avenir. Un jour, le curé de la
paroisse nous demande, dans son sermon du dimanche, de venir assister à une réunion spéciale le samedi soir suivant.
« Toutes les familles en chômage vont peut-être trouver une solution à leurs problèmes », a-t-il dit.

Le jour de la réunion arrive. Le curé nous dit que le gouvernement offre des terres et un peu d'argent aux gens de la ville
qui veulent retourner vivre à la campagne. Il parle alors de coloniser l'Abitibi et le Témiscaminque, très loin au nord de
Montréal. On nous promet le nécessaire pour vivre les premières années, le temps de bâtir une maison, d'abattre les
arbres et de préparer la terre.

J'accepte de m'engager. Les pères de famille partent les premiers pour aller défricher et construire une maison. Deux jours
de train, à dormir sur une banquette de bois, sans couverture. Nos affaires sont dans un autre wagon. Une fois arrivés en
Abitibi, nous embarquons sur un petit bateau. Il n'y a pas encore de routes pour se rendre sur les nouvelles terres. La rivière
est le seul chemin.

On nous débarque en plein bois. Il faut marcher un ou deux kilomètres dans un petit sentier avant d'arriver. Rendu dans
notre rang, on se met à plusieurs pour défricher. Avec les plus gros arbres, on se construit une première cabane. Puis le
groupe travaille à la construction d'une route. Chacun se garde un peu de temps pour construire sa propre maison.

On fait de grands feux pour se débarrasser de toutes les branches. Tout le monde s'entraide sinon, on ne réussira jamais
à être bien installé pour recevoir notre famille.

Quand la maison de bois rond est habitable, c'est le temps d'envoyer une lettre à sa famille pour leur demander de venir
nous rejoindre. Je pense qu'ils vont être déçus en arrivant. Le gouvernement ne nous a pas encore donné l'argent promis.
Pour l'instant, on a plutôt l'air de bûcherons dans un chantier. La route n'est pas terminée… Et l'électricité, nous n'y pensons
même pas.

Ma terre est située à deux kilomètres du village. Enfin… si on peut appeler ça un village. Il y a une maison pour le magasin
général ; une maison pour le jeune curé, qui vient juste de sortir du grand séminaire ; et une autre pour le gars du gouvernement.

Parfois, je me demande si le gouvernement et le curé de Montréal ne nous ont pas joué un mauvais tour. On manque
de tout : nourriture, logement, savon, outils… Quant à être pauvre ici, j'aime mieux vivre en ville avec ma famille et mes
voisins. Ici, je vis avec trois autres gars comme moi, dans une cabane en bois rond perdue dans la forêt.

Présentement, j'ai seulement un petit coin de défriché autour de la maison. Il faut que ma femme puisse faire un jardin
lorsqu'elle arrivera le printemps prochain. Je ne sais pas comment on cultive ça, une terre. Je suis né en ville et j'ai
toujours travaillé dans une usine. Si jamais le métier de colon-cultivateur est trop difficile, je retournerai en ville.

 

 

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