La vie domestique en temps de guerre

1. La récupération

 

Résumé :

Les restrictions dans l'approvisionnement ont amené les femmes à recycler les vieux vêtements et à récupérer certains
restes de nourriture pour approvisionner les usines de guerre.

Références :

AUGER, Geneviève et Raymonde LAMOTHE, De la poêle à frire à la ligne de feu, Montréal, Boréal Express, 1981.

Enseignement primaire, volume IV, no 2, Octobre 1944, page 204.

Auteure :

Micheline Champoux

 

Lorsqu'en 1939 le Canada est entré en guerre, la vie de tous les Canadiens a été transformée. Les Québécois n'étaient
pas tous d'accord pour envoyer des soldats combattre pour l'Angleterre. Mais ils ont quand même dû, comme
tous les autres Canadiens, participer à la guerre en envoyant des soldats, en travaillant aux usines de guerre, en
faisant de la récupération.

Au Québec comme ailleurs, le gouvernement a demandé aux femmes de participer à l'effort de guerre. Bien sûr, elles
travaillaient dans les usines de matériaux de guerre, mais on insistait surtout pour que chaque mère, dans son foyer,
économise et fasse de la récupération.

Les journalistes expliquaient que l'électricité consommée dans les maisons privait les usines de ce courant électrique.
On demandait donc aux ménagères de réduire de 20% leur consommation d'électricité. Comment ? En remplaçant les
ampoules de 100 watts par des 40 watts et en les époussetant plus souvent pour obtenir un meilleur éclairage, en ne
remplissant la baignoire qu'à moitié, en n'écoutant pas la radio pour rien, etc.

Les usines de guerre manquaient de matières premières. Aussi, on a organisé une vaste campagne de récupération
des déchets domestiques. On a demandé aux femmes de trier les déchets : papier, tissu, caoutchouc, graisse, os,
métal et verre devaient être emballés séparément.

En septembre 1944, le Surintendant de l'Instruction publique a demandé à tous les instituteurs d'organiser des cueillettes
de gousses de coton sauvage (asclépiade) avec leurs élèves. Les soies blanches contenues dans ces gousses devaient
remplacer le kapok (une fibre imperméable qui ne pourrit pas) dans la fabrication des appareils de l'armée.

Le papier était recyclé pour fabriquer des contenants imperméables pour le transport de la nourriture et des munitions en
Europe. Ainsi, les colis pouvaient être jetés à la mer et recueillis à marée basse. Cela accélérait le débarquement.
Les livres et les revues étaient envoyés outre-mer pour désennuyer les soldats.

Les vieux chiffons étaient recyclés en tapis, en pansements ou en couvertures. Les vieux manteaux de fourrure étaient
transformés en vestes pour les marins. Il fallait recueillir 25 000 vestes pour répondre aux besoins de la marine.

Avant la guerre, les fabricants de savon achetaient 31 000 tonnes d'huile végétale des autres pays. Les bateaux-citernes
servant au transport de l'huile était désormais utilisés pour transporter du pétrole en Angleterre. On a demandé aux
ménagères de ramasser toute la graisse de bacon, de friture ou autres. La graisse devait être coulée dans un tamis
et déposée dans une boîte métallique.

Lorsque la quantité de graisse amassée atteignait une livre, il fallait la porter chez le boucher qui payait le prix fixé par
le département des services de guerre. On utilisait ce gras pour faire du savon ou des explosifs. Des annonces dans
les journaux expliquaient qu' « avec un kilo de vieille graisse, on pouvait tirer suffisamment de glycérine pour
lancer cinq obus antichars ».

On ramassait aussi les os : ils fournissaient de la glycérine ou étaient convertis en colle pour la construction d'avions.
En six mois, la récupération de 41 000 vieux tubes de pâte dentifrice ou de crème à barbe a fourni de 14 000 kilos
d'étain pour les fonderies. Dans les écoles et les pharmacies, on ramassait le papier de plomb, d'étain et d'aluminium.

Les campagnes de recyclage se sont étendues aux vêtements. L'importation de tissus était difficile et les usines
de vêtements confectionnaient des habits de soldats. Le coton était rare ; la flanellette, introuvable. La publicité montrait
comment faire des pyjamas et des sous-vêtements d'enfant dans de vieux sous-vêtements d'homme.

Pour économiser le tissu, on a émis certains règlements concernant la mode : la longueur d'une robe ne devait pas
dépasser 107 cm, de la nuque au bord fini ; les robes longues étaient interdites aux demoiselles d'honneur ; on interdisait
les longues traînes pour la mariée.

Le départ de milliers de soldats laissait des milliers d'habits inutilisés dans les garde-robes. Partout dans le pays, on a donc
donné des cours de couture nouveau genre : comment transformer un habit d'homme en un élégant costume deux-pièces
pour dame ; on montrait aussi comment transformer une chemise d'homme en robe d'enfant.

Pour remplacer les bas de soie, les usines fabriquaient de gros bas en coton mêlé d'un peu de nylon. Les femmes
n'aimaient pas ces bas peu élégants. Et à cette époque, ce n'était pas la mode de sortir sans bas, même l'été.

Les jeunes filles remplaçaient donc ces bas en étendant sur leurs jambes une lotion imitant la couleur et la texture
des bas de soie. Ensuite, elles traçaient une ligne noire bien droite en arrière de la jambe afin d'imiter la couture du
bas. Mais cette teinture avait l'inconvénient de tâcher les vêtements et les draps.

Tout ce qui précède ne constitue qu'une partie des « trouvailles » pour faire des économies et du recyclage pendant
la guerre. Tu constates que c'était très différent du gaspillage actuel qui pollue notre environnement et qui nous empêche
d'investir notre argent dans des biens qui ne vont pas à la poubelle après une seule utilisation.

Penses-tu que les écoliers d'aujourd'hui pourraient s'occuper de récupérer les pots de verre, le plastique, ou même
les tubes de dentifrice dans les écoles ?

 

 

 

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