La qualité des eaux souterraines

L'eau potable provenant des puits municipaux est en général de bonne qualité. Les problèmes rencontrés sont plutôt d'ordre esthétique et sont surtout reliés à des concentrations élevées en manganèse, en fer et en chlorures dans certains puits. La situation est différente en ce qui concerne les puits domestiques dans lesquels des problèmes de contamination bactériologique s'ajoutent aux problèmes d'ordre esthétique. Près de 40% des puits résidentiels échantillonnés dépassaient au moins une des normes bactériologiques. En ce qui concerne plus spécifiquement les coliformes fécaux, 12% des puits étaient non conformes. Il est à noter que la qualité bactériologique des puits municipaux ne fut pas évaluée dans le cadre de cette étude puisqu'elle fait déjà l'objet d'un suivi régulier. La contamination bactériologique des puits privées est attribuable à la proximité des sources de bactéries (fosses septiques et champs d'épuration, épandages agricoles, etc.) combinée soit à la vulnérabilité élevée de l'aquifère (nappe libre, matériau de surface perméable, taux de recharge élevé) ou à la vulnérabilité des puits eux-mêmes (puits de surface, accumulation d'eau autour du puits, absence de collerette étanche, margelle insuffisante) facilitant l'infiltration d'eaux de surface contaminées vers le puits. Les puits les plus vulnérables sont les puits de surface, situés dans les aquifères granulaires à nappe libre, dans les zones urbaines ou à vocation agricole. Lorsque ces quatre facteurs de risque sont réunis, la probabilité que les puits soient contaminés est de 70%.

Coliformes-totaux

Mises à part les normes bactériologiques, 7% des puits échantillonnés dépassaient une des normes d'eau potable reliées notamment aux concentrations en fluorures, en baryum et en nitrates. Les dépassements en fluorures (4% des puits) et en baryum (2%) sont d'origine naturelle. Les matériaux en place contiendraient une forte proportion de fluorures expliquant la concentration élevée de cet anion par le passage de l'eau dans les fissures du socle rocheux, principalement dans les nappes captives. Les dépassements en baryum ont également été observés en condition confinée dans la plaine argileuse et dans le paléo-delta de la rivière Saint-Maurice et semblent être liés à la présence d'eau salée fossile. En ce qui concerne les nitrates, bien qu'il n'y ait qu'un seul dépassement de la norme, 19 puits (8%) présentaient des concentrations entre 3 et 10 mg/L, ce qui est considéré comme étant au-dessus du bruit de fond naturel. Une analyse isotopique (tritium et 15N), dans un des secteurs touchés par les nitrates, suggère que les concentrations élevées seraient entre autres liées à l'épandage de fertilisants agricoles. L'analyse de la distribution spatiale des puits suggère que les portions du territoire possédant une vocation agricole, particulièrement dans les aquifères granulaires à nappe libre, présentent des risques accrus de contenir des concentrations élevées en nitrates. Les installations septiques résidentielles et la fuite de réseaux d'égouts pourraient également être des sources de nitrates, bien que dans une moindre mesure.

nitrates

En ce qui concerne les recommandations d'ordre esthétique, les problématiques les plus fréquentes sont reliées à des concentrations excessives en manganèse, en fer, en solides totaux dissous, en chlorures, en sodium et en sulfures. La dureté de l'eau et le pH sont également hors norme dans certains puits. Sur les 243 puits résidentiels et municipaux échantillonnés, 34% dépassaient la recommandation esthétique concernant le manganèse et 20% dépassaient la recommandation esthétique du fer. Cette problématique est fréquente sur l'aquifère à nappe libre du paléo-delta de la rivière Saint-Maurice, à l'intérieur des limites de la Ville de Trois-Rivières, pour laquelle il s'agit d'un enjeu économique important, puisque des activités de traitement d'eau et de réhabilitation de puits sont souvent nécessaires. Ces métaux sont souvent présents à l'état naturel en raison de l'altération météorique des roches et des minéraux. Au stade actuel des recherches en cours, l'hypothèse la plus plausible pouvant expliquer les variations spatiales dans les concentrations en fer et manganèse à l'intérieur du même aquifère serait la dégradation de la matière organique en surface. Cette hypothèse est basée notamment sur la présence de milieux humides en amont de la majorité des puits possédant de fortes concentrations en Fe et Mn. La présence de matière organique diminue les concentrations en oxygène et en nitrates dans les eaux souterraines, créant un milieu réducteur, ce qui peut accélérer la solubilisation du fer et du manganèse puisque ces ions agissent comme donneurs d'électrons.

manganese

Les matières dissoutes totales sont composées de sels inorganiques et de petites quantités de matières organiques. Près de 7% des puits dépassaient la recommandation esthétique reliée aux matières dissoutes, surtout au sud de la Mauricie. Les dépassements en nappe captive peuvent être expliqués par des causes naturelles, telles la présence d'une eau salée fossile ou la géologie en place, alors que les dépassements en nappe libre peuvent être reliés à des fuites du réseau d'égout, au ruissellement en milieux urbain, agricole ou industriel et aux sels déglaçants. Dans le cas des dépassements esthétiques en chlorures (5% des puits) et en sodium (3%), les concentrations élevées dans les nappes libres seraient liées à l'épandage de sels déglaçants, alors que les concentrations élevées dans les nappes captives seraient liées à la séquestration d'eau marine fossile de la mer de Champlain il y a plus de 10 000 ans. Aucune recommandation n'existe en ce qui concerne la dureté de l'eau. Toutefois, les concentrations >500 mg/L sont considérées comme étant inacceptables pour l'eau potable. Au total, neuf dépassements ont été observés, souvent associés à la présence d'eau salée fossile ou à de fortes concentrations en différents ions.

sels