Département d'anatomie
À l’UQTR la mort est heureuse d’aider la vie
  • 7 octobre 2013
  • Le Nouvelliste
  • Brigitte Trahan brigitte.trahan@lenouvelliste.qc.ca

À l'UQTR la mort est heureuse d'aider la vie

Trois- Rivières — L'étude de l'anatomie humaine ne datant pas d'hier, qui croirait que le corps humain n'a pas encore livré, de nos jours, tous les secrets de sa structure?

PHOTO: FRANCOIS GERVAISLe professeur Gilles Bronchti, directeur du département d'anatomie de l'UQTR et le professeur Detlev Grabs pratiquant ici une échographie articulaire sur un corps Thiel.

C'est pourtant le cas. Nombreux sont les chirurgiens et autres médecins spécialistes qui se rendent au laboratoire d'anatomie de l'Université du Québec à Trois- Rivières pour approfondir leurs connaissances du corps humain, apportant avec eux des questions auxquelles les anatomistes n'ont pas encore de réponses et que seule la recherche permettra d'élucider.

Le mur de l'entrée du laboratoire est orné d'une maxime qui en dit long sur l'ambiance qui règne dans cet endroit où plus de 40 corps servent la science chaque année: « Hic est locus ubi mors gaudet succurrere vitae » ( Ici la mort est heureuse d'aider la vie).

Et ici, on aide la vie d'une manière différente de la grande majorité des laboratoires d'anatomie en l'Amérique du Nord puisqu'on dispose de corps Thiel.

Ce sont des cadavres humains préservés selon une méthode révolutionnaire développée par l'anatomiste Walter Thiel, en 1992, qui permet de conserver plusieurs caractéristiques du corps vivant, notamment au niveau de la texture et de la souplesse des tissus et des articulations.

La méthode a été importée d'Europe à Trois- Rivières grâce à Detlev Grabs, médecin allemand, aujourd'hui professeur au département d'anatomie de l'UQTR.

Ces corps sont extrêmement appréciés par les scientifiques à cause de leur potentiel pour la recherche par simulation en anesthésie et en chirurgie, explique le directeur du département, le professeur Gilles Bronchti.

« Quand on fait une ponction lombaire sur un corps Thiel, par exemple, on a exactement la même sensation que chez le patient. On a vraiment des textures semblables», illustre-t-il.

Ces corps se soumettent aussi parfaitement aux techniques d'échographies, d'angiographie, d'arthroscopie et de laparoscopie. D'ailleurs, le professeur Grabs a développé, avec deux de ses étudiants, une méthode permettant d'injecter dans les corps Thiel un produit qui colore en rouge les territoires vasculaires que l'on souhaite étudier. « On a tout un pan de recherche là- dessus avec un chirurgien plasticien et un chirurgien vasculaire » , indique le professeur Bronchti.

« Par exemple, il y a beaucoup d'incisions qui se font au niveau fémoral, car c'est l'entrée classique de la chirurgie vasculaire. Mais l'incision se cicatrise très mal » , raconte- t- il. Personne ne savait exactement pourquoi, ditil, mais les corps Thiel sont en train de révéler que cette région est tout simplement peu vascularisée.

Des recherches sont aussi en cours sur la chirurgie mammaire qui pourront éventuellement permettre de réduire la quantité d'anesthésies employées sur les patientes.

Bref, le laboratoire d'anatomie de l'UQTR veut répondre aux questions qui viennent du terrain, résume le professeur Bronchti.

On croirait que ce repère de la science anatomique n'est réservé qu'aux initiés. Or c'est tout le contraire.

Lorsque le laboratoire a été rénové et agrandi, il y a quelques années, on a pris soin d'aménager une vaste entrée pour y accueillir jusqu'à une quarantaine d'élèves du secondaire ou du collégial en même temps.

Une panoplie de pièces anatomiques embaumées par plastination ou autres méthodes sont exposées dans des vitrines afin de stimuler la curiosité scientifique.

Le laboratoire d'anatomie de l'UQTR avait été démarré sous l'impulsion courageuse du professeur Régis Olry, médecin français, il y a précisément 20 ans cette année. Courageuse, parce que dans ces années-là, beaucoup de laboratoires d'anatomie fermaient leurs portes au Québec, raconte le professeur Bronchti.

Mais avec le développement des sciences de la santé anticipé à l'UQTR, à cette période, le jeu valait la chandelle. On accueille aujourd'hui, au laboratoire, des étudiants en chiropratique, en podiatrie, en orthophonie, en neuropsychologie ainsi que les étudiants du campus trifluvien de la faculté de médecine de l'Université de Montréal, sans compter un grand éventail de médecins spécialistes en quête de savoir.

Plusieurs autres étudiants de diverses disciplines de la santé, comme l es ostéopathes, l es acupuncteurs, les physiothérapeutes et infirmières auxiliaires y reçoivent aussi des formations ponctuelles, indique le directeur du département.

Plus de 2000 personnes se sont enregistrées à l'UQTR pour faire don de leur corps le jour de leur décès. « Nous avons même des familles de donneurs», indique le professeur Bronchti.

La méthode de conservation Thiel, introduite à l'UQTR en 2008, permet de rendre ces précieux corps disponibles à la science six semaines après le décès, ce qui est tout à fait remarquable puisque les corps classiques, eux, doivent être mis en chambre froide pendant 8 à 9 mois avant d'être disponibles pour la dissection, explique le professeur Bronchti.

Le laboratoire ne fait que commencer à se développer, à en juger le nombre croissant de besoins auxquels il répond. Les professeurs Bronchti et Grabs rêvent notamment de la création d'un centre de simulation avec une salle d'opération pour le développement des approches chirurgicales.

Le respect envers les corps confiés au laboratoire d'anatomie est une priorité, à l'UQTR, indique- t- il. D'ailleurs, une cérémonie pour les défunts qui ont fait don de leur corps est animée par un prêtre annuellement pour les familles. Pas moins de 400 personnes y prennent part.•

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