13. Le plus beau et le plus rare de tous les simples.

Dans la plupart des traités de botanique du XVIe et du XVIIe siècles, on ne montre du Citron  que la branche avec ses feuilles, ses fleurs et ses fruits alors que Nicolas laisse voir la plante entière.

À la page 25 du Codex Illustration, qui peut être classée comme celle des arbres fruitiers, rares et curieux, Nicolas met en évidence le Citronnier qui produit apparemment autant de fruits que de feuilles. Nicolas connaît la rareté de cet arbre en France et attache de l'importance dans sa description au format, à la quantité de fruits, à leur couleur, à leur goût, à l'écorce qui sert à établir le rapprochement avec l'espèce européenne, aux feuilles dentelées et à l'écologie de cette plante:

"C'est icy le plus beau, et le plus rare de tous les simples que i'aye iamais remarqué dans tous mes voyages, il croit a l'orée des bois et au milieu des prairies de la Virginie, sa hauteur est des plus de 3 pieds géometriques, ordinairement chaque plant aporte dix ou douze fruits: aussi gros qu'un oeuf de poule dinde, l'ecorce de ce fruit ressemble entierement a nos citrons, sa figure est la même, il a 3 couleurs un peu vert, un peu jaune, un pû rouge dans sa maturité il est tout iaune, quand il est a demy meur il est d'un excellent gout, etant trop meur il est trop doux. Sa graine ressemble a celle du melon, mais elle est plus petite, elle se seme d'elle même, et revient tous les ans. Sa plante se desechant, et mourant tous les hyvers, sa feuille est dentelée."*.

Il faut penser que les fleurs odoriférantes et les qualités du Citron en font une plante recherchée par plusieurs. En 1694, Pomet dans son Histoire générale des drogues précise l'itinéraire de ce simple recherché. Ce sont les marchands

"de S. Remmes en Rivière, de Gennes, de Nice, de Manton, petite ville appartenante au Duc de Savoye, d'où ils (les Citrons) nous viennent par mer & par terre à Marseille, Lyon, Roüanne, & de là à Paris."*.

Cette plante était très convoitée des nobles et des bourgeois au XVIIe siècle. Nous reviendrons là-dessus dans nos paragraphes sur l'Oranger. Retenons qu'on "se sert en Médecine de son fruit, rarement de ses feuilles, & de sa fleur"*. Dans sa figure du Codex, Nicolas ne montre pas la fleur et présente un nombre égal de fruits et de feuilles Illustration. Pomet dit de la feuille et de la fleur du Citronnier qu'elles "contiennent beaucoup d'huile à demi exaltée & de sels volatils. Elles sont cordiales & fortifiantes."*. Quant aux propriétés médicinales du Citron, Pomet les résume ainsi:

"L'Ecorce du Citron & principalement sa partie extérieure, qui est jaune, est propre pour fortifier le coeur, l'estomach, le cerveau & pour résister au venin. Le suc de Citron est cordial, rafraîchissant, propre pour désaltérer, pour précipiter la bile, pour calmer les ardeurs du sang, & pour resister au venin. La semence contient beaucoup d'huile & un peu de sel volatil, elle est cordiale résiste au venin; & chasse les vents."*.


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