10. Des cèdres du Canada et de la Virginie vers la Cédria égyptienne et le bois de la croix de la Passion

Dans son paragraphe d'introduction aux arbres, Nicolas ajoute qu'il s'accomode autant que possible "aux idées que les habiles botanistes auroient peu se former de la lecture des principaux écrivains sur ces matières"*. Il s'empresse de faire savoir à son lecteur que, ce que les livres montrent, diffère de l'observation sur le terrain et que "toutes les particularités dans un pays fort éloigné du nôtre [de la France] et où presque tout y est different."*. Cette différence saute aux yeux dès que l'on compare les branches, les feuilles, les fruits, l'écorce et le bois des végétaux. Nicolas précise en décrivant leur couleur, leur odeur, leur goût et, s'il y a lieu, leurs propriétés thérapeutiques. Les comparaisons avec les spécimens provenant de France et le savoir des anciens botanistes complètent sa description. Par exemple, la hauteur du Cèdre blanc est comparée à celle du "plus haut clocher de Vance"*, ses pommes diffèrent par leur petit format de celles du Cèdre de l'Asie et du Liban. Le texte de Nicolas est beaucoup plus court et aborde de manière moins rigoureuse les principaux éléments de la classification de l'Histoire générale des Plantes de Dalechamps. Il existe cependant plusieurs similitudes entre l'Histoire naturelle de Nicolas et l'Histoire générale des plantes (1586-87 et 1653) de Jacques Dalechamps et de Jean Des Moulins. Nicolas et Dalechamps étudient deux espèces de Cèdre, depuis la taille jusqu'à la couleur, à l'odeur, au goût et aux propriétés médicinales: les textes sont proches. Alors que Dalechamps dit des feuilles du Cèdre qu'elles "sont odorantes, un peu aigre, & astringeantes, avec un bien peu d'amertume."*; Nicolas rappelle à son lecteur que les feuilles du Cèdre sont "toujours vertes et odoriferentes [qu'] elle sont astringeantes, aigres et un pû ameres"*. L'histoire des subtiles nuances entre la poix ou la résine de Cèdre et le Cedrium de Dalechamps se résume ainsi:

"On peut amasser sur lecorce du tronc de l'arbre deux sortes dencens: ou de poix rezine l'une est liquide et fort puante, apre, et forte pour son odeur transparente comme de l'ambre j'aune, l'autre est seche elle sert dencens, et l'odeur même est pas desagreable, mais elle nét pas si odoriferente que l'encens de l'Arabie."*.

Il ajoute plus loin qu'il "ny a point de doute qu'on ne puisse faire la cedria des egyptiens de nos cèdres". Et si Dalechamps en citant Pline rapporte "que les Rois d'Égypte et de Syrie à faute de sapin usoient de cedre, pour faire leurs navires"*; Louis Nicolas précise que "les barbares en (avec le bois de Cèdre) doublent commodement leurs canots /.../."* .


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