7. Iconographie du Montamin ou Bled d'Inde (suite 2.)

Le texte de Louis Nicolas sur le Maïs est caractéristique du modèle de description qu'il adopte pour toutes les plantes importantes de l'Histoire naturelle. Nous avons souligné plus haut le rapport aux textes du XVIe siècle de Ruel, Bock et Fuchs. Nicolas accorde plus d'importance à ses observations qu'aux textes du passé et classe les plantes du Nouveau Monde dans un esprit semblable à celui des botanistes du XVIe siècle. Comme eux, Nicolas étudie les plantes pour connaître leurs propriétés thérapeutiques et leurs vertus:

"Les Boulangeres du pays en font une sorte de pain qui est fort rude aussi charge-t-il beaucoup l'estomach: quoyque le grain dont il est paitry soit merveilleusement laxatif, et quil purge un peu trop, dans les commencemens qu'on n'est pas acoutumé a ces sortes de vivres le ventre senfle extraordinairement, et avec douleur de telle maniere qu'il semble qu'on va crever quelques heures aprés tout cela passe par un benefice de ventre, et avec tant devacuation qu'on se trouve extremement purgé et mourant presque de faim: amis encore vaut-il mieux uzer de cette drogue que de mourir de faim et la manger sans sel, sans graisse, et sans autre chose que de leau toute pure que de se laisser mourir de faim auprés d'une chaudiere plus commode a donner a manger a des animaux inmondes qu'a des hommes, qui n'ont pour tout ragout que quelques mechans aricots melés avec quelques citrouilles sans nul assaisonement que de leau toute claire. Au reste ie crois dêtre obligé de dire icy que le grain de bled d'inde concassé, et boully dans de leau seulement est tres bon pour guarir des retentions d'urine, et pour ramolir les duretés qui empechent avec des effroyables incomodités plusieurs personnes d'aller a la selle J'ay veu des belles experiences pour guarir de ces deux incommodités."* .

Comme Pline l'Ancien qui s'intéressait à la place d'une plante dans la vie romaine, Nicolas informe sur la manière dont les Amérindiens apprêtaient le Maïs en Nouvelle-France:

"Les fammes sont les munieres, et leur moulin n'est fait que de deux pierres entre lesqu'elles ces menageres le concassent: ou bien elles le grillent dans un grand mortier de bois qu'elles ont creusé avec du feu, le pilon est une longue barre de quelque bois dur. Dautres fois sans façon elles le font bouillir tout entier, cuit de cette manière, il est extremement grossier, et fort indigeste car il est touiours dur quoy qu'il ayt bouly les 4 ou 5 heures. La meilleure façon de le manger est de le cuillir lorsqu'il est encore en lait, et et de le faire bouillir un peû de tems; ou sans autre peine de le tendre au soleil sur des ecorces pour le faire secher, et le mettre ensuite dans des sacs a la mode des Indienes qui en font de tres beaux de lecorce du bois blanc qu'elle font bouillir et en font une espece de tres beau chanvre dont on fait mille petits utencilles aussi bien que de diverses autres decorces d'arbres fort propres pour faire du fil, et des cordages. L'ortie, la cotonaria, le bois de plom, les corce d'orme, celle du noyer amer leur sont fort propres pour toutes ces sortes de traveaux, et pour plusieurs autres: iusques même a faire de tres beaux filets pour la peche. Quand on veut manger le bled d'inde preparé de la façon que ie viens de dire on le pile comme jay dit ou l'on le fait bouillir, et il est tres bon, aussi est il le plus cher. Quand on veut le manger un peu meilleur que l'ordinaire il faut le faire rôtir a la mode des Barbares ou sous la cendre brulante: ou sous le sable ardant d'ou on le tire avec une espece de crible pour le separer d'avec le sable, on le mange ainsi tout entier ou l'on le pile il est bon des deux façons, il est moins ingeste, et plus nourissant estant en farine, et on en fait de la boulie."*


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