D'OÙ VIENT VOTRE NOM ?

Par Yann Grandeau, revue Historia,
No 407, octobre 1980, pages 113-118


" Notre identité n’est-elle pas d’abord définie par
un nom? Quand l’idée est-elle venue de différencier
les êtres par une appellation personnelle? Comment
celle-ci est-elle née? " Yann Grandeau, auteur de
À la Recherche de vos ancêtres, guide du généalogiste
amateur, Éditions Stock, 1997,  répond à ces questions.
On peut dire avec Marcel Proust, dans Le Temps
retrouvé :" Un nom, c’est bien souvent tout ce qui
reste pour nous d’un être, non pas même quand il
est mort, mais de son vivant… "

Jusqu’au XIIIe siècle, les Français, du moins ceux qui
n’appartenaient pas à la noblesse, n’étaient désignés dans
les actes que par leur nom de baptême. L’usage du surnom
(cognomen), qui permettait de distinguer dans un village
ou un quartier les personnes de même prénom (nomen),
est donc assez récent.

Attribué par des voisins, quelques fois au hasard,
qu’il évoque une origine, une qualité, un événement
ou une singularité, le surnom n’avait pas alors la valeur
d’un patronyme. On l’utilisait par commodité, mais
on ne voyait aucun inconvénient à le changer. Tel individu,
qui était dit Lelong à cause de sa taille, devenait
Lebossu après un accident qui le déformait ; tel autre
appelé Cornard parce que les infidélités de sa femme
en faisaient la risée du pays, était, au retour d’un
pèlerinage, tenu pour Romée, l’auréole que lui
conférait le voyage à la ville sainte interdisant
qu’on rît de son infortune.

Ce ne fut qu’en 1539 que le pouvoir se préoccupa
de légiférer sur ce point.
François 1er établit, par l’édit de Villers-Cotterêts,
la transmission de père en fils des surnoms,
les fixant ainsi définitivement. La création de l’état civil
mit dans ce domaine un terme à la fantaisie.

Mais il ne faudrait pas en conclure que tous les
noms de famille connus aujourd’hui datent de cette
époque et que, par exemple, l’ancêtre d’un Couturier
taillait les robes au XVIe siècle ou que celui d’un
Langlais avait fui la tyrannie de Henri VIII. Les choses
ne sont pas si simples.

En vérité, le gouvernement de François Ier s’était
contenté d’officialiser et d’étendre une coutume
souvent observée dès le Moyen Âge. Il était
fréquent que l’on donnât le surnom du père
à l’enfant, qui le conservait toute sa vie, même
s’il ne correspondait plus à rien, et le transmettait.
On disait tout naturellement Jean le fils au brun,
Guillaume le fils au bailli ; puis, par ellipse, Jean Aubrun,
Guillaume Aubailli, ou plus simplement Guillaume
Bailli. Dans ce cas,  on employait aussi le diminutif :
Blanchet pour Blanc, Petiot pour Petit.

1. LE SURNOM DU PÈRE

Cela pouvait durer plusieurs générations,
jusqu’à ce qu’un descendant du brun ou du bailli
depuis longtemps oublié, présentât lui-même une
singularité ou fût le héros d’une aventure assez
extraordinaire pour lui mériter un surnom particulier.

Nous trouvons dans un compte de 1316 un Gille
Harenger, tabellion ; dans un rôle de 1421, un Adenet
Le Bouchier, boulanger ; un Perrin Le Bouchier,
vendeur de vins ; un Guillaume Le Sueur, ferron ;
un Jean Le Sueur, maraîcher ; un Thomin Chartier,
tavernier ; un Jean Le Barbier, boulanger ; Gillet
Le Barbier, coutelier, un Mahiet Le Barbier, charpentier ;
un Thévenin Le Barbier, orfèvre.

C’est donc au Moyen Âge que remonte l’origine
des patronymes français, ce qui rend parfois la
recherche étymologique difficile, car beaucoup
de métiers et de lieux ont disparu, beaucoup de mots
ont perdu leur sens initial.

Nous ignorons, d’autre part, dans quelles
circonstances un surnom a pu être attribué.
On appelait aussi bien Leroy celui qui avait
remporté la victoire dans un tournoi d’archers,
celui qui avait tiré la fève au cours d’un banquet
d’Épiphanie, celui qui avait tenu dans un mystère
le rôle du souverain ou celui qui affectait
des allures de majesté. Lecureux était-il roux, agile ou
économe? Appréciait-il les noisettes ou possédait-il un
écureuil familier? Nous voyons qu’il convient de
demeurer prudent.

Nous pouvons diviser les noms de famille en quatre catégories :

2. FILS DE…

D’abord, parce qu’ils sont les plus anciens, ceux qui sont
dérivés de prénoms. Par une démarche naturelle, on avait
dès le haut Moyen Âge, avant que l’usage des surnoms
se fût répandu, pris l’habitude, pour éviter toute confusion,
de désigner, les individus par l’épithète " fils de " ou " fils à ".

Les documents, les contrats surtout, nous offrent
de nombreux exemples de cette formule. Mais,
dans la vie courante, on simplifiait : Pierre fils au
Paul, Martin fils de Jean, Thomas fils Roger
s’appelaient plutôt Pierre Aupaul, Martin Dejean,
Thomas Roger. De préférence, on utilisait les diminutifs :

Les enfants d’Étienne étaient Thenot, Thenon,
Thenard (forme péjorative, voir les méchants
Thénardier dans "Les misérables" de V. Hugo),
Étiennot, Estève, Étiévant, Thevet, Thevin,
Thouvet, Thévard, Thévenet, Thouvenel,
Étiemble, Stévenel ;

Ceux de Jean étaient Jeannet, Jeannard, Jeannenet,
Jeannequin, Jeannesson, Jeandillou, Jentel, Jouandet,
Jouandon, Jeanson ;

Ceux de Guillaume : Guillaumet, Guillaumin,
Guillemaud, Guilmin, Guilmot, Guillou, Guilleux,
Guillain, Guillard, Guillerand, Guilleton, Guillechin,
Guilloteau, Guillouet, Guilly.
Nous ne pouvons donner toutes les variations
d’innombrables prénoms, qui se présentent
d’ailleurs eux-mêmes sous des formes et des
graphies différentes suivant la région.

Ainsi, Guillaume est Guilhem dans le Midi,
Guillerme (Guillermou) dans le Centre, Villerme
et Vuillaume (Vuillaumet, Vuillermet, Vuillemenot,
Vuillemain, Vuillin, Vuillard), dans l’Est. Willème
(Willemet, Wilmote, Willequin, Willet, Willot),
dans le Nord.

Signalons que l’origine des diminutifs n’est pas
toujours facile à déterminer.
Il n’est pas évident en effet que Massot, Massin,
Thomeret, se rattachent à Thomas, Pernoud à Pierre,

Tinaud à Martin. Certains patronymes gardent
le souvenir de noms de baptême tombés en
désuétude tels Ascelin,  Arnoulf, Flour, Foulques,
Pépin, Macaire. Enfin les prénoms ont donné
naissance à quelques matronymes :
Isabey (Isabelle), Lamartine (la veuve de Martin).
 

3. D'APRÈS LE MÉTIER

L’idée d’attribuer aux personnes le nom du métier
qu’elles exerçaient paraît ancienne ;
c’était une manière simple de distinguer Jean
le cordonnier de Jean le pêcheur.

Nous rencontrons :

Boucher (Leboucher, Bouchier, Bouchez, Boucheiz,
Bouquier, Bouchereau) ;
Boulanger (Boulenger, Boulongier, en Bretagne) ;
Couturier (Lecouturier, Cousturier, Couturieux,
Lacouture);
Faucheur (Faucheux, Lefaucheur) ;
Leclerc. ( clerc de notaire...)
Tisserand (Tissier, Texier, Teysseyre, Tissot,
Teyssandier, Texandier, Tesseraud) ;
Marchand (Lemarchand, Marchandeau,
Marchadier), etc.

Mais il faut savoir que les métiers ne portaient
pas toujours au Moyen Âge les noms sous lesquels
nous les connaissons aujourd’hui. Le cuisinier était
le queux ; le boulanger était le fournier (d’où
Fourneret, Fourneyron),  le cordonnier
(de cordoanier, marchand de cuir de Cordoue)
était le sueur (du latin sutorem);
le médecin était le mire (d’où Miret, Mirot),
le mège dans les pays d’oc ; le forgeron était
le fèvre (du latin fabrum), d’où Lefèvre, Lefebvre,
Lefebure, Fevret, Faivre, Favre, Favreau, Faure;
le pâtissier était le gatellier ; le charpentier était
le chapuis.

Des métiers ont disparu : l’ouvrier qui était chargé
de transporter le sel dans les salines compoises
était au XIVe siècle, appelé poulain ; on nommait
chaintrier le fabricant de chaintres (grilles, treillis).

Mais on connaissait aussi les artisans et les
commerçants sous les noms des objets qu’ils
confectionnaient ou des articles qu’ils vendaient:
Cornet, Couteau, Poisson (Peysson).

Un ouvrier se voyait désigné par son outil :
Marteau, Tenaille, Pic (Picard) ; ou par un geste
caractéristique : Tournesac (meunier), Balavoine,
Balpétré (bat le pétrin, boulanger), Coppée
(en ancien français l’action de couper, bûcheron) ;
Maillefer (forgeron), Tueboeuf, Tuvache (boucher).

Quelques surnoms comportaient un jugement
de valeur : Cassemiche, Galmiche, (gâte la miche),
Paingris, Gateblé, Gateclout, Gatefossé, Gatbois,
Bonouvrier, Bonnemie (boulanger).

Enfin des habitudes prises dans la pratique de
la profession créaient des sobriquets. Lebel cite un
Meur de soif, boulanger en 1492, un Chace pie
(Guigne-boisson), verrier en 1292, la chaleur du
four incitant à boire.

Par analogie, nous placerons dans cette catégorie
les nomsévoquant une dignité ou une fonction
administrative : Chevalier, Lécuyer, Levasseur,
Bailly, Lemaire, Lechevin, Dizain (dizainier),
Prévost, Chambellan.

4. D'APRÈS L'ORIGINE GÉOGRAPHIQUE

Beaucoup de surnoms rappellent l’origine d’un immigré.
Dans le village où il était venu s’installer, ses voisins
marquaient leur défiance en insistant sur son état
d’étranger :
Langlais, Lallemand, Lespagnol, Picard, Poitevin,
Champagne, Toulouse, Bordeaux ; Déroulède vient
de Roulède en Dordogne, Descartes du hameau
Les Cartes en Indre-et-Loire.

La particule dans ce cas fait souvent illusion, mais
ni Jacques d’Arc ni Guillaume de Lorris ne sont nobles.
Le généalogiste doit soigneusement éviter des
confusions de cet ordre. Il ne faut pas non plus
qu’il tombe dans le piège et s’imagine retrouver
aisément la trace de ses ancêtres dans le village
dont ils portaient le nom. Nous exprimons
une évidence en indiquant qu’ils y étaient connus
sous une autre appellation.

D’autre part, celui que l’on nommait Langlais
n’était pas toujours né en Angleterre. Il pouvait
bien n’y avoir séjourné que peu de temps. Le fait
qu’il connût la langue  de ce pays ou qu’il manifestât
le désir de s’y rendre, sans jamais le réaliser,
justifiaient aussi le sobriquet.

Notons encore que la préposition de (du, des)
ne signale pas seulement la provenance, mais
le domicile. Dumont peut être celui qui est descendu
dans la vallée, comme celui dont la maison est située
sur la montagne. Dupont, Deschamps, Degrange,
Duchêne, Duchemin, Dumas, Desmoulins
se comprennent aisément.

Plus difficiles à expliquer sont Ducauroy
(plantation de coudriers) ; Desorts
(des jardins, du latin hortus) ; Despériers
(poiriers) ; Desplaces, Desrues ( le pluriel étonne);
Durond (une maison située sur un rond-point
ou un terrain rond).

L’emploi fréquent du patois dans la formation
spontanée de ces noms rend souvent malaisée
leur interprétation :
Delrieu est la forme occitane du ruisseau
(Duruy dans l’Est, Durif dans le Bourbonnais) ;
Dupraz signifie du pré en Savoie ; Deheuga,
de la fougeraie en gascon ; Dufrêne se transforme
suivant la région en Dufraisne, Dufragne, Dufrègne,
Durfraisse, et donne Fragneau, Fragnier, Fraissinet,
Freycinet, Fresson, Fressenon, Fressange.

Plus rarement que sa situation, l’aspect de la maison
qualifie l’homme qui la possède ou l’habite : Caseneuve,
Desmasures, Duperron.

Connaissant le caractère des Français, on pourrait
croire que les sobriquets représentent la majorité
des noms de famille :
ils n’en constituent que 10%. Cela surprend
d’autant plus que nous avons gardé le goût
d’affubler de surnoms nos camarades,
nos professeurs, nos collègues.
 

5. D'APRÈS UNE SINGULARITÉ PHYSIQUE

Mais, par essence, le sobriquet est personnel,
qu’il se trouve suggéré par une singularité
physique, un défaut du caractère ou
un événement, et l’impossibilité de
le transmettre explique peut-être qu’il
ait donné naissance à si peu
de patronymes. Nos ancêtres n’étaient pas
si naïfs qu’ils n’aient hésité à nommer Lebossu
le fils d’un homme contrefait, mais lui-même
bien bâti. La plus grande fantaisie règne
dans ce domaine et les particularités
qui peuvent exciter la facétie sont innombrables.

5.1. C’est d’abord l’apparence :

Legrand, (Grandet, Grandot, Grandeau,
Grandin, Sigrand) ;
Lelong (Longet, Longeret, Longeau,
Longuet, Longeard) ;
Lepetit (Petit, Petiot, Petion, Petiteau, Petitot) ;
Lecourt (Courtot, Courtet, Courtecuisse) ;
Lenain (Nanet, Nanin) ;
Le gros (Grosset, Grousset, Grosclaude,
Groscolas, Grosdidier) ;
Legras (Grasset, Grassard) ;
Lerond (Rondel, Rondeau, Rondot) ;
Boulet (Boulot) ;
Boudin (Boudinet) ;
Maugras (" gras et méchant " ou " maigre "?) ;
Tonneau (Tonnelat : " gros comme un tonneau " ou
" marchand de tonneaux "?) ;
Maigre (Lemaigre, Maigret, Maigrot, Magre,
Magrin, Magron, Lemaingre de l’ancien français
" mingre " : chétif) ;
Lelarge (Largeau, Larget, Largeteau) ;
Lefort, (Fortet, Forton, Forteau, Fortin,
Fortépaule, Forthomme) ;
Carré, Lequarré ;
Ledru ;
Lebeau (Lebel, Bellet, Bellon, Bellot,
Beluchon en Périgord, Beaucorps, Beaucourt :
" beau et petit ", Beaudroit, Beaudrez, Belgrand,
Belhomme) ;
Lecointe (en ancien français : " joli, plaisant ",
Lecointre, Cointeau, Cointereau) ;
Bienfait, Fétis (de l’ancien français " faitis " :
bien fait) ;
Poubeau (" peu beau ", matronyme : Poubelle) ;
Lehideux.

5.2. Chaque partie du corps peut offrir,
dans sa forme, sa taille ou sa couleur,
une anomalie digne de remarque.

1. La tête : Caboche (Cabasse, Cabasson,
Cabet, Cabot, Chabot) ;
2. Les dents : Ledentu (Le Dantec en Bretagne) ;
3. Le nez : Camus, Nazon (" petit nez ", Nazet) ;
4. Les oreilles : Loreillard, Blet (" pâle ", Bleton) ;
5. Le teint de peau : Bleu (" blafard ") ; Noir
(Lenoir, Néraud, Noiret, Noirot, Nérat, Néré) ;
Moreau (" noir de peau comme un Maure ", Morel,
Morlet, Morand, Maurin, Morin, Morot, Mornet,
Mornard).

5.3. Les cheveux et la barbe :

Poilleux (Poilot, Poilfoulot : " poil follet " ;
Poilvé : " poil levé " hirsute, Pellevat en occitan,
Pelu, Peleux) ;
Maupoil (Maupeou) ;
Crépin (" crépu ", Crespel, Crispin) ;
Lecavelé (" l’échevelé ") ;
Hure (" hérissé ", Lahure, Hurot, Hurel, Hurard) ;
Hurpé, Lehérissé (Héricier) ;
Leroux (Rousseau, Roussel, Rousselet) ;
Lerouge (Rougeau, Rouget, Rougetet) ;
Brun (Lebrun, Brunel, Brunot, Bruneau, Brunet,
Bruneteaud, Brunier, matronyme : Brune) ;
Blond (Leblond, Blondel, Blondin, Blondanet,
Blondaleau) ;
Legris (Grisel, Griseau, Griselin, Grison, Grisard);
Girvel (" cheveux mêlés de noir et de blanc ",
Griveau, Grivelet) ;
Blanc (Leblanc, Blanchet, Blancheteau,
Blanchard, Blanchy) ;
Chenu (Chenut, Chenuet, Canut, Canu,
Lecanu, Lecanuet) ;
Barbé (Barbu, Barboux) ;
Tondu, Chauve (Chauveau, Choveau, Chauvel,
Chauvin, Chauvineau, Chauvard).

5.4. Les membres :

Piedfort (Piéplu : " poilu ", Piédoux) ;
Bellemain, Brassart, Poincarré (" poing carré ") ;
Épaulard, Courtecuisse, Culot.

5.5. Les difformités, les infirmités, les maladies,
les blessures ont toujours suscité la verve
des plaisantins bien portants :

Leborgne (Borgnet, Borniot, Borniol) ;
Loucheur (Louchet, Louchard, mais Lelouch
est dérivé de l’algérien el-allouch : l’agneau) ;
Le bègue (Béguet, Bégot, Bégu, Baube,
Baubet, Bauderon);
Muel (" muet ") ;
Lesourd (Sourda, Sourdeau, Sourdillon) ;
Lemoigne (" manchot ") ;
Cancre (" cabre " en ancien français : qui a des
jambes tordues) ;
Letort, Bossu (Bossuet, Bossuat) ;
Boché, Bocheux, Lecourbe, Boiteux,
Clopin (Clopard) ;
Goumon (" goitre " en ancien français) ;
Grain (" bouton, verrue ", Graindorge) ;
Lefol (Folant, Folâtre, Follain, Follet,
Folliet). Et de vingt autres raisons

5.6. De nombreux sobriquets évoquent
le caractère, les qualités et les défaut,
les aptitudes, les manies

Ledoux (Doucet) ;
Bon (Lebon, Bonin, Bonnot, Bonamy,
Bonenfant, Bonhomme) ;
Mauvais, Malagré, Malenfant, Malhomme ;
Lefranc, Lesage.
Courtois, Gracieux (Graciet), Gentil ;
Lecoy (" le silencieux ") ;
Braillard, Bruant (" bruyant "),
Graille (" corneille " : personne criarde) ;
Hardy, Vailland, Couard (Couaud) ;
Tardif (" lent ", Tardy, Tardiveau, Tardieu) ;
Crochu (" avare ") ;
Coquart (" sot, niais ", Cocardeau, Cochin,
Cocheteau) ;
Baillard, Truffaut (" trompeur ") ;
Gaillard (" Joyeux "), Galland (" vif, enjoué ") ;
Grinchard (" grincheux ") ;
Lamoureux, Laimé ;
Boinvin, Boileau.

Mais il ne faut pas toujours prendre
ces qualificatifs au pied de la lettre. Nos ancêtres
ne manquaient pas d’ironie: Avenant pouvait être
disgracieux et Bonhomme rudoyait souvent
ses valets.

6. SCATOLOGIE ET SEXUALITÉ

La scatologie et la sexualité jouaient un
rôle important dans la formation des surnoms :
Chibon, Chidaine, Chipoulet, Paillard, Lecoq,
Couillard, Pissard, Vitu, Vergeot. Les maris
trompés étaient ridiculisés : Cocu, Cornu
(Lecornu, Cornard, Cornaud), Trochu
(Trochet, Trochard). Nos ancêtres avaient
la verve grossière.

7. MANIÈRE DE SE VÊTIR

Certains sobriquets venaient d’une originalité
dans la manière de se vêtir : Mantel (Mantelet) ;
Poulaine, Brongniard (de " broigne " : cuirasse),
Lacotte, Chappe (Chapart, Chapdelaine, Capet) ;
d’autres, de locutions favorites, de jurons :
Dieutegard, Dieulot (" Dieu l’entend"),
Depardieu, Damedieu, Equoy (" Eh quoi! "?) ;

8. NAISSANCE

D’autres, d’un événement qui avait marqué
la naissance : Trouvé, Champy (enfant abandonné
dans les champs?), Bastard, Lebâtard ; D’un baptême
administré tardivement après une conversion, Payen,
Sarrazin, Convert ;

9. PÉRIPÉTIE EXTRAORDINAIRE

Ou d’une péripétie extraordinaire : Leroy, dont
nous avons donné déjà les différentes interprétations
(L’empereur avait gagné, plusieurs années de suite,
le prix d’un tournoi d’archers), Pèlerin (Pèlegrin),
Romée (Romieu, Roumier),
Paumier (" celui qui a rapporté une palme de Palestine "),
Coquille (" celui qui s’est rendu  à Saint-Jacques-de-
Compostelle "), Ranson désignait le soldat qui avait
dû se racheter ; Larminat, le partisan des Armagnacs.
Mais à quelles anecdotes faisaient allusion : Prince,
Baron, Labbé, Lévêque?

10. RÈGNE ANIMAL

D’autres étaient empruntés au règne animal
par analogie : la démarche faisait penser au canard,
la voix au corbeau (Corbin), la douceur au mouton
(Belin dans le Roman deRenart), la violence du loup,
(Leleu, Louvet, Louviot, Louvois, Loubet), la ruse
au goupil ; d’autres, enfin, indiquaient un rapport
de parenté : Beaufils, Beaupère, Neveu, Cousin.

11. LIEUX DIVERS

Il faut réserver une place à part aux noms
bretons : Caër (" beau "), Caradec (" aimable "),
Galouédec (" puissant "), Le Bras (" le gros "),
Le Hir (" le long "), Le Goll (" le forgeron "),
Le Floch (" le page "), Le Gall (" français "),
Guézénec (" du bosquet ") ;
basques : Bidegaray (" Chemin haut "), Irigoyen
(" village de bois "), Etchevery (" maison neuve ") ;
flamands : Vanaker (" du champ "), Vandermersch
(" de la prairie "), Vendermeulen (" du moulin "),
Huyghe (" Hugues "), qui se sont répandus en France
dès le Moyen Âge.
Quelques patronymes étrangers ont été francisés :
Acremant (Ackermann), Hermant (Hermann),
Maire (Mayer). Mérimée serait une adaptation
de merry maid (" joyeuse jeune fille ").

12. NOMS JUIFS

Plus récents sont les noms juifs : Levy, Cahen
(il s’agit sans doute de familles immigrées au
XIXe siècle).

13. ENFANTS TROUVÉS

Ce ne fut qu’après l’établissement de l’état civil
que l’on prit l’habitude d’affubler les enfants
trouvés de surnoms singuliers, rappelant
soit le jour (Deux, Cinq, Six, Huit, Dix,
Dimanche, Avent, Quasimodo, Noël, Tiphaine),
soit le mois (Janvier, Avril, Juin),
soit le lieu (Vestibule),
soit les circonstances de leur découverte :
un nouveau-né que l’on avait fait passer à
travers les barreaux de la porte d’un hospice,
en 1796, fut nommé Desbarreaux.